Dominique Fernandez Vous êtes ici : Accueil > Vie > Ils ont dit de lui
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Romancier et essayiste (Porporino ou les Mystères de Naples, Dans la main de l'ange...) Dominique Fernandez a préfacé Une Aventure d'amour, récit de la passion éphémère entre Dumas et la cantatrice Caroline Ungher en Sicile, Vingt ans après, et d'autres livres de Dumas. Il a également publié de nombreux articles sur l'écrivain et, en 2000, Les douze muses d'Alexandre Dumas (Grasset). Nous reproduisons ici l'interview qu'il nous avait accordée à l'occasion de la publication de ce livre.

Pourquoi vous lancer dans cette entreprise de réhabilitation de Dumas que constitue votre essai ?

Dumas est un écrivain qui n'est jamais étudié, ni au lycée, ni à l'université. Il est considéré comme un « rigolo », un auteur que l'on ne peut prendre au sérieux. Même si de nombreuses biographies lui ont été consacrées, mon livre est le premier essai littéraire jamais publié sur lui en France. Pour moi, Dumas est l'égal de Balzac et de Hugo, et je voulais le faire savoir.

Pourquoi, selon vous, un tel mépris envers Dumas ?

Parce qu'on le lit à l'âge de quatorze ans et que l'on méprise ensuite ce que l'on a lu à cet âge ! Pendant longtemps, on a fait de même avec Don Quichotte : on le lisait, enfant, en version abrégée et on ne le lisait plus jamais par la suite. Des auteurs comme Swift ou Melville subissent encore le même sort.

En outre, Dumas est victime du succès de deux ou trois titres comme Les Trois mousquetaires, qui sont effectivement spécialement adaptés à des lecteurs adolescents. Alors que plein d'autres de ses livres ne sont pas du tout particulièrement destinés à de jeunes lecteurs.

Vous affirmez que la gloire de Dumas repose sur deux traits : « la critique du pouvoir et de l'argent, la sensibilité aux différences ». N'essayez-vous pas, dans une certaine mesure, d'en faire un écrivain « politiquement correct », selon nos critères actuels ?

Pas du tout ! Si j'insiste tout au long du livre sur le fait que Dumas a un quart de sang noir, c'est parce que c'est un élément très important pour lui, qui parcourt toute son œuvre. Quant à Monte-Cristo, c'est bien une très violente critique des puissants.

Vous rééditez simultanément chez Grasset deux romans de Dumas oubliés depuis très longtemps. Comment les avez-vous choisis ?

J'ai retenu Catherine Blum car c'est un roman à l'opposé des grands romans historiques que l'on associe habituellement à Dumas. Le livre se passe à son époque, dans sa province, avec un rendu scrupuleux de la couleur locale. En outre, il s'agit probablement du premier roman policier français, avec une enquête minutieuse pour trouver le vrai coupable. L'autre, Jacquot sans Oreilles, est l'un de ces romans russes qui constituent une période passionnante de l'œuvre de Dumas. On sait qu'après ses grands voyages à travers la Russie, Dumas a écrit cinq ou six romans qui s'y rapportent. Dumas avait adoré la Russie et vice versa : il y a dans les deux cas une extravagance, une démesure... Et la Russie continue à l'adorer. On y prépare une réédition de l'intégrale de son œuvre !

Avez-vous d'autres projets dumasiens ?

J'ai en chantier un Musée idéal de Dumas, en collaboration avec le photographe Ferrante Ferranti, sur le même modèle que ce que nous avons déjà fait chez Stock pour Stendhal et Zola. L'idée est de réunir une centaine de tableaux et de statues que l'écrivain concerné aurait aimé avoir chez lui. La reproduction de ces œuvres est accompagnée des propres commentaires de l'auteur. Dumas a énormément écrit sur la peinture, la sculpture : voyez Italiens et flamands, Trois maîtres, ou ses textes sur Delacroix. Ce livre pourrait sortir pour le bicentenaire de Dumas, en 2002.

Propos recueillis par Patrick de Jacquelot

© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
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