Titre
Catherine Blum
Année de publication
1854
Genre
Roman
Collaborateur(s)
aucun selon les bibliographies de Reed et Munro - Max de Goritz avec un
point d'interrogation selon le Quid Dumas
de Claude Schopp
Epoque du récit
1829
Résumé
Nous sommes en mai 1829, dans la forêt de Villers-Cotterêts,
sur les lieux de l'enfance de l'auteur. Guillaume Watrin, chef des gardes-chasse
du duc d'Orléans, a de son épouse Marianne un fils, Bernard,
garde-chasse lui aussi. Ils ont également élevé Catherine,
fille de Rose Watrin, la soeur de Guillaume, et d'un prisonnier allemand
blessé, Frédéric Blum, qui fut recueilli par la famille
en 1808.
Catherine
et Bernard s'aiment, d'abord comme frère et soeur, puis comme des
amants. Mais Mathieu, enfant abandonné et recueilli par le couple
Watrin, est férocement envieux, et cherche à faire échouer
le projet de mariage de Catherine et Bernard.
Mathieu parvient à rendre Bernard follement jaloux de Louis Chollet,
un jeune et riche Parisien qui s'est promis de séduire Catherine.
Mathieu, qui a un fond méchant, a su se faire passer pour idiot
depuis son enfance, neutralisant ainsi toute défiance. Il organise
alors un piège machiavélique pour inciter Bernard à
tuer Louis; mais Bernard, profondément honnête, renonce in
extremis au meurtre. C'est Mathieu lui-même qui tire alors sur Louis
avec le fusil de Bernard, pour faire accuser le jeune homme. Il espère
ainsi se débarrasser du même coup de ses deux rivaux.
François, fin pisteur à la chasse et ami de Bernard, parvient
par une habile suite de déductions à prouver l'innocence
de Bernard et à démasquer Mathieu, dénoncé
par sa cupidité même. On apprend en même temps que
Louis n'est que légèrement blessé.
Catherine et Bernard vont pouvoir s'aimer et se marier. Mathieu est condamné
au bagne de Toulon, et meurt quelque temps après lors d'une tentative
d'évasion.
Analyse
Nous devons à Dominique Fernandez la réédition de
ce court roman, passé longtemps inaperçu. Difficile, en
effet de trouver une critique, une analyse, ou quelque information jusqu'à
cette édition récente et la préface du même
auteur.
Catherine Blum a été écrit
durant le séjour de Dumas à Bruxelles, de 1851 à
1854, époque où il s'exile pour échapper à
ses créanciers. C'est une période particulièrement
productive, avec l'écriture entre autres de La
Comtesse de Charny, Isaac
Laquedem, et Mes Mémoires.
Catherine Blum serait inspiré
des Forestiers d'Iffland, qui figure
parmi les textes que Dumas fait traduire à la même époque
par Max de Goritz. Dumas en a tiré par la suite un drame en cinq
actes intitulé Les
forestiers, joué à Marseille en 1858 puis à Paris
en 1865.
Pour Dominique Fernandez, l'intérêt principal de ce roman
est de montrer que Dumas était parfaitement capable d'écrire
un récit contemporain de son époque sans l'appui de la dimension
historique. Il s'agirait même du premier roman policier.
En effet, Catherine Blum tient à
la fois du théâtre, de l'étude de moeurs, du conte
et du roman policier. Dumas s'y implique intimement, décrivant
d'abord avec émotion les lieux de son enfance, les alentours de
Villers-Cotterêts, rappelant des anecdotes de chasse qu'il vient
de rédiger dans ses Mémoires.
Drame : l'action du roman se noue pour l'essentiel dans la maison
du garde forestier. Seule une scène importante, où les passions
se déchaînent, se déroule à l'extérieur,
sur la place du village. Roman policier : il y a tentative de meurtre,
enquête, et un suspense final plutôt efficace.
Étude de moeurs : Dumas détaille avec amour ces lieux
et ces gens de la forêt, employés par les puissants pour
un de leurs plaisirs favoris, la chasse, et tente de nous sensibiliser
à leur finesse et leur complexité. Ce sont les mêmes
lieux et types qu'il a mis en scène dans ses grands romans de la
révolution, dont Ange
Pitou (avec Catherine, fille d'un fermier révolutionnaire
courageux, éprise d'un jeune noble, etc.). On sait par ses Mémoires
et d'autres textes la place qu'a eue la chasse dans sa formation, école
de la solitude comme de l'amitié, lieu d'initiation par les
amis de son père défunt. L'intrigue est d'ailleurs située
en 1829, année de son premier succès au théâtre
avec Henri III et sa cour.
Faut-il y voir un lien logique implicite, entre son enfance d'école
buissonnière et la revanche du succès auquel personne ne
voulait croire ?
Catherine Blum est aussi un conte, où
les cousins germains, élevés en frère et soeur, se
vouent un amour premier et insouciant, jalousé par des malveillants
dont il finira par triompher... On songera par exemple au début
du Comte de Monte
Cristo, publié dix ans plus tôt, où la confiance
trop naïve des amants Edmond et Mercédès, d'Edmond
surtout, est démentie par l'envie et la méchanceté
des autres. Ici, le dénouement est bien plus simple, rapide et
heureux.
Jean-Michel Assan
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