Alexandre Dumas, ses filles et leurs mères (n°24) Vous êtes ici : Accueil > La Société > Les Cahiers Dumas
Page précédente | Imprimer

Homme de mouvement, homme de désir, homme de plaisir, Alexandre Dumas a naturellement multiplié les liaisons amoureuses. Les mille et trois maîtresses de ce Don Juan bonhomme ont passé furtivement le long de sa course debridée à travers la vie. Comme des ombres. Leur nombre est trop considérable pour que chacune d'elles pût être considérée longuement. Aussi, les juge-t-on toutes généralement insignifiantes.

Pourtant, chaque fois qu'un regard dépourvu de préjugés s'arrête sur l'une de ces irrégulières, il découvre des fragments d'existence quelquefois riches d'enseignements psychologiques ou sociologiques, souvent touchants, toujours romanesques.

La redécouverte d'un monument, la tombe de Micaëlla Cordier, et d'un document d'état-civil, l'acte de naissance de Belle Krelsamer, a constitué le point d'appui de deux enquêtes parallèles sur ces deux femmes particulières que furent les mères des deux filles de Dumas. Que connaissions-nous d'elles ? Presque rien, fût-ce leur nom ou prénom.

Les biographes n'évoquaient jusqu'ici Emélie (et non Emilie) Cordier qu'à l'aide de quelques témoignages contemporains très partiaux et d'éléments glanés dans les Souvenirs et impressions manuscrits de Micaëlla Cordier, conservés dans les papiers Alexandre Dumas fils de la Bibliothèque nationale (n.a. fr. 24 642) : c'est pourquoi, publiant intégralement ce manuscrit, dans lequel transparaît l'existence pathétique du Bébé d'Alexandre Dumas - trois lettres de Dumas au Petit Journal nous disent la tendresse qu'éprouvait le vieux père pour sa petite fille - , nous l'avons considérablement enrichi par des notes qui pouvaient éclairer les souvenirs souvent confus de Micaëlla ; les archives d'état-civil ont mené à reconstituer les familles d'Emilie Cordier : sa famille d'origine, sa famille légitime (son mari, Oscar Edwards, et ses enfants : Berthe, René, Emile, Andrée et Jacques Edwards), sa longue liaison avec Edouard Goepp ; ses lettres retrouvées à Lorédan Larchey, conservateur de la Bibliothèque de l'Arsenal, donnent même à entendre la voix de l'amiral vieillissant.

Belle Kreilssamner (et non Krelsamer), quant à elle, avait eu son historien, Maurice Châtelier, descendant par alliance de la comédienne, qui avait déposé à la Bibliothèque de la Comédie-Française trois feuilles manuscrites, notices biographiques des quatre sœurs Kreilssamner. Les renseignements fournis, qui comportaient des zones d'ombre, demandaient à être complétés. Des documents importants (acte de mariage des parents, actes de naissance des sœurs, actes notariaux, quelques lettres, précisions sur sa carrière théâtrale) ont été mis au jour, retouchant largement cette première esquisse biographique, difficilement accessible.

Si, à première et courte vue, ces documents témoins de vies éparses éloignent de l'œuvre, ils nous semblent au contraire plonger au coeur de la création dumasienne : Marie et Micaëlla sont les petites sœurs de leurs frères, nés tout armés du cerveau de leur père : Antony, Raoul de Bragelonne, Salvator des Mohicans de Paris, Sébastien Gilbert des Mémoires d'un médecin. Tous bâtards.

© Société des Amis d'Alexandre Dumas - 1998-2008 Haut de page
Page précédente