Mémoires d'Horace Vous êtes ici : Accueil > Œuvre > Dictionnaire des œuvres
Page précédente | Imprimer

Titre Mémoires d'Horace écrits par lui-même

Année de publication 1860

Genre Roman

Collaborateur(s) -

Epoque du récit de 55 à 27 avant JC

Résumé Quintus Horatius Flaccus vécut de l'an 65 à 8 avant notre ère. Dumas raconte à la première personne la formation reçue par ce fils d'affranchi qui sera témoin des guerres civiles au cours desquelles la République s'effondre pour donner naissance à l'empire des Césars dont le premier sera Octave, renommé César Auguste.

Après nous avoir rappelé comment à l'époque le maître utilisait la férule autant que les tabulae pour former les élèves, Dumas-Horace nous présente les grands courants philosophiques qui influençaient politiciens, militaires et poètes dans la grande cité antique et pourquoi lui, Horace, choisit de devenir disciple d'Épicure.

Rapidement, la pseudo-autobiographie cède le pas à la présentation des grands acteurs de cette société décadente: Cicéron, Caton, Pompée, Crassus, César, Brutus, Marcellus, sans oublier Antoine, Cléopâtre et Octave. A l'exception de ce dernier, tous périront violemment.

Le poète qui tient la plume du poète ne nous épargne aucun détail des assassinats, suicides et innombrables violences qui meublaient le quotidien de la ville souveraine comme celui des terres conquises.

Il ne raconte pas toute la vie des personnages illustres qu'il a connus, mais certains hauts faits d'armes ou anecdotes qui ont façonné la personnalité des protagonistes de cette grande tragédie. On ne saura rien ainsi du triomphe de César sur Vercingétorix dont le nom n'est même pas mentionné. Ni de ses amours avec Cléopâtre, si ce n'est le fait que le fruit de leur idylle, Césarion, sera exécuté sur ordre d'Octave.

La cruauté est dépeinte avec forces détails dans la description des jeux offerts par Pompée pour souligner son triomphe et accroître sa popularité: éléphants, rhinocéros, lions, cervidés, chiens de chasse et gladiateurs fournissent au peuple assoiffé de sang des morts courageuses et d'une violence sauvage. Dumas-Horace explique aussi comment les conquérants exigeaient des conquis quantités de fauves et de bêtes en guise de tributs. Cette ménagerie peu commode était destinée à préparer leurs triomphes.

La plume de Dumas-Horace devient des plus grandioses pour mettre en scène la mort horrible de Pompée, décapité par des mercenaires devant sa femme bien-aimée.

Citant souvent Horace à travers divers procédés littéraires, Dumas nous explique également l'importance qu'accordaient les chefs romains aux présages et aux oracles. Ce sont eux qui décourageront Pompée et Antoine et précipiteront leur chute.

Après le triomphe d'Octave sur Antoine et Cléopâtre qui sonne le glas des guerres civiles, Horace revient sur sa vie et complète ses mémoires par sa rencontre avec Mécène qui lui offrira une maison de campagne.

La narration se termine en évoquant vaguement la possibilité de nouveaux mémoires portant sur ses souvenirs de la vie d'Octave devenu empereur, mais Dumas-Horace ne les écrira pas.

Analyse Bien que sa construction soit quelque peu brouillonne, il s'agit d'un fort beau texte de Dumas où il nous fait partager sa grande affection pour la Rome antique.

Dumas fait comme si Horace écrivait pour être lu plusieurs siècles après sa mort, au XIXe, ce qui l'autorise à quelques paragraphes didactiques conçus pour ses lecteurs. Le flux torrentiel de son inspiration et les délais de production l'obligent cependant à écrire vite, ce qui l'amène à commettre quelques anachronismes qui font sourire. Ainsi lit-on que des hommes de César lui apportent des papiers au Sénat...

Dumas fait en revanche preuve de recherches assez approfondies, décrivant avec minutie les vins de l'époque, leurs différentes élaborations et propriétés homéopathiques. A n'en pas douter, il était bien documenté.

On s'explique mal en somme que Mémoires d'Horace écrits par lui-même n'ait jamais paru en volume du vivant de l'auteur qui ne mourra pourtant que dix ans après la publication en feuilleton.

Négligence de son éditeur Michel Lévy ou de son secrétaire Noël Parfait, on ne sait trop quoi supposer. Le livre a finalement été édité en 2006 aux Belles Lettres. Mais la copieuse préface de Claude Aziza ne nous est d'aucun secours. On n'y apprend rien sur la conception de l'œuvre, ni sur sa réception par le public. La marque d'un collaborateur ou d'un canevas sur lequel l'écrivain aurait pu broder n'est pas évidente. Le style unique de Dumas se reconnaît à toutes les pages.

On sait cependant que le peintre Delacroix parle de cette oeuvre dans son Journal. Voici l'extrait du 6 août 1860, tel qu'on peut le lire dans le Cahier Dumas intitulé Mon cher Delacroix: «Dumas m'a plu aussi avec ses Mémoires d'Horace insérées dans Le Siècle. C'est une idée heureuse et le peu que j'en ai lu m'a paru finement et ingénieusement arrangé». Ce jugement a son importance: si Dumas vouait une admiration sans borne au peintre, l'inverse était plus nuancé.

Mémoires d'Horace est un texte dont la place devra être réévaluée dans le grand oeuvre de Dumas. Ce roman enrichit un corpus déjà impressionnant que Dumas a consacré à l'Antiquité (Acté, Isaac Laquedem, César, Auguste - encore inédit -, Le testament de César, Caligula, etc.).

En outre, contrairement à ce qu'on veut parfois nous faire croire, il fait ressortir que Dumas ne s'est pas intéressé seulement à l'Histoire de France, même si ses plus grandes réussites en sont inspirées.

Rudy Le Cours
© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
Haut de page
Page précédente