Titre
Jarvis l'honnête homme
Année de publication
1840
Genre
drame en deux actes (Gymnase-Dramatique, 3 juin 1840)
Collaborateur(s)
Charles Lafont
Epoque du récit
1685-1688
Résumé
L'histoire commence à Londres en 1685 au moment où le roi
Jacques II, d'une manière agressive et imprudente, tente de restaurer
le catholicisme. Compromis en raison de ses liens avec les opposants au
"papisme", et convaincu de trahison, l'honnête marchand
Jarvis est condamné à mort. Il obtient de son geôlier
la permission de passer sa dernière nuit chez lui, pour revoir
sa fille Cordelia, la marier à son homme de confiance Harry, et
surtout mettre de l'ordre dans ses affaires : il tient à ce que
la réputation de sa maison de commerce ne soit point ternie par
ce drame personnel. Apprenant la condamnation de son père, Cordelia
le drogue et, avec la complicité d'Harry, l'embarque sur un bateau
à destination de la Hollande (Acte I). Trois ans plus tard, Cordelia
et Jarvis connaissent les tribulations des exilés. De plus le marchand
de Londres a perdu la raison : en effet, son geôlier, Melvil, a
été exécuté à sa place, et son déshonneur
a rendu fou le pauvre homme. Réfugié chez le médecin
Van Claer, poursuivi par le chef de la police de Jacques II, Jarvis se
livre - même s'il vient d'apprendre que Melvil, son geôlier,
avait miraculeusement échappé à la mort grâce
aux soins du docteur Van Claer. L'annonce in extremis de la "Glorieuse
Révolution" de 1688 qui vient de porter au pouvoir Guillaume
d'Orange sauve Jarvis et lui laisse espérer un prompt retour à
Londres : en sauvant Melvil, Dieu ne l'a-t-il pas justifié ? (Acte
II)
Analyse
Ce qui caractérise d'abord cette pièce peu citée,
et attribuée à Dumas par Glinel, c'est sa structure, inhabituelle
: seule, une autre uvre du "théâtre inconnu"
(c'est-à-dire non signé par notre auteur), Le
Garde-forestier (1845), et l'opéra Thaïs
(1852, mais dont le livret est resté inédit), sont en deux
actes. Jarvis a en même temps la longueur moyenne d'un drame en
trois actes, et c'est avec ce nouveau découpage que la pièce
sera reprise à la Porte-Saint-Martin sous le titre Le
Marchand de Londres en janvier 1842. Il n'est pas indifférent
que Dumas situe son drame au moment où la Grande-Bretagne, après
la "Magna Carta" en 1215, et l' "Habeas Corpus" en
1679, s'apprête à proclamer en 1688 la première "Déclaration
des droits". Mais cela ne fait pas de ce mélo assez mal ficelé
une pièce politique digne de figurer dans le "théâtre
républicain". Son intérêt réside peut-être
dans cette péripétie étrange, un pendu trop tôt
dépendu et ramené à la vie par un médecin
curieux des choses de la mort, lequel, rassuré sur la bonne santé
de son patient, rédige une communication destinée à
l'Europe scientifique
Cela recoupe des préoccupations propres
à Dumas qui semblent se faire jour dès cette époque,
la peine de mort, l'immortalité, la question scientifique du passage
de la vie à la mort, que l'on retrouvera dans Le
Comte Hermann en 1849. On se perd en conjectures sur l'origine de
cette histoire. Il y eut bien un Marchand de
Londres écrit par George Lillo, vanté par Diderot
comme un modèle de tragédie bourgeoise (et l'on sait l'intérêt
de Dumas pour le genre), et il y a un "Jarvis" dans Le
joueur que le même Diderot traduisit de Moore en 1760, mais
ni l'un ni l'autre ne peuvent vraiment être considérés
comme des modèles de cette pièce. Charles Lafont collabora
au moins une autre fois avec Dumas, deux ans après, pour Le
Séducteur et le Mari. Auteur de drames, de comédies,
il a surtout comme notoriété dans l'histoire des lettres
d'avoir été plagié par
Victor Hugo ! (Charles
Lalo, L'économie des passions,
Vrin, 1947).
François Rahier
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