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Titre Une fille du Régent

Année de publication 1846

Genre Théâtre

Collaborateur(s) -

Epoque du récit 1719

Résumé Gaston de Chanley a été désigné pour tuer le Régent. Surpris par son commanditaire, le marquis de Pontcalec, dans une lande bretonne battue par la neige, Gaston se voit sommé de s'expliquer. Il dit alors qu'il va faire ses adieux à la fille qu'il aime, une orpheline recueillie dans un couvent. Il s'agit d'Hélène de Chaverny, une fille cachée du Régent (Prologue).

A Paris, Gaston retrouve Hélène, appelée dans la capitale par le grand seigneur dont elle croit être la fille. Pendant ce temps, l'abbé Dubois, ministre du Régent, intrigue pour démêler les fils de cette nouvelle conspiration (Acte I). Il se débarrasse du capitaine La Jonquière qui devait introduire plus avant Gaston dans le complot, et, se faisant passer pour lui, obtient la confiance du jeune homme (Acte II).

Dubois convainc le Régent de jouer à son tour la comédie à Gaston; toujours grimé, il fait rencontrer au jeune homme le Régent jouant au grand d'Espagne comploteur. Gaston met sous sa protection Hélène. Comprenant tout, ému par la générosité de Gaston, le Régent tente d'arrêter la machine infernale montée par Dubois (Acte III).

Après une ultime péripétie – l'évasion de Gaston machinée par Dubois qui veut le faire passer pour un lâche aux yeux du Régent – l'intrigue se dénoue heureusement: revenu à Paris accomplir sa mission, Gaston est gracié par le Régent, avec les autres conspirateurs, au grand dam de Dubois. Il épousera Hélène (Acte IV).

Analyse On considère souvent par erreur Une fille du Régent comme la suite du Chevalier d'Harmental. Il s'agit bien plutôt d'œuvres jumelles, ainsi qu'on peut le voir dans la fiche consacrée à l'adaptation dramatique du Chevalier d'Harmental, les pièces comme les romans étant nés du récit tiré par Maquet du Journal de Jean Buvat, le mémorialiste de la Régence, et soumis à Dumas.

Dumas appelle «drame» la pièce tirée du Chevalier d'Harmental, qui racontait la conspiration de Cellamare, affaire ayant eu un dénouement heureux. Et il fait une «comédie» de celle qu'il tire d'Une fille du Régent, qui a pour toile de fond l'autre conspiration de ces années 1718-1719, dite de Pontcallec, laquelle se termina tragiquement. Si ce second roman est fidèle à l'histoire, comme le premier, la pièce, elle, s'achève sur une nouvelle grâce du Régent. Nous reviendrons sur ce paradoxe...

Autre intérêt de cette œuvre, si l'on prend en considération la première version, demeurée inédite, Hélène de Saverny ou Une conspiration sous le Régent, drame en cinq actes reçu au comité de lecture du Théâtre Français dans sa séance du 10 décembre 1843, Une fille du Régent est un des rares exemples chez Dumas d'une pièce ayant précédé le roman (Une fille du Régent publié en 1844). Frank Reed, qui a conservé le manuscrit de la première version, note qu'Une fille du Régent (créé au Théâtre Français le 1er avril 1846) le suit assez fidèlement, mis à part la suppression du quatrième acte qui se déroulait à la Bastille. Il indique aussi certains emprunts au roman (le prologue sous la neige, la scène entre Dubois et le valet Oven au cours de laquelle la pile de pièces d'or promises en récompense croît ou décroît au fil des réponses du personnage), mais selon lui le texte définitif de la pièce aurait aussi bien pu être complété avant l'achèvement du roman.

Les commentateurs s'accordent pour dire que Maquet influença la fin tragique du roman, bien dans sa manière, et ne collabora pas avec Dumas pour la pièce devenue comédie. Une bonne comédie au demeurant, avec des moments de réelle intensité dramatique (en particulier les scènes avec le Régent, partagé entre bonhomie et politique, et pour lequel Dumas montre une inclination manifeste), des passages franchement comiques (la scène entre Dubois et Oven), et d'autres au romanesque tirant vers le mélo (quand Dubois et le Régent  se déguisent en conspirateurs).

Il est arrivé que Dumas choisisse pour son théâtre un «happy end» non conforme à l'esprit de l'œuvre initiale, ce qui sera le cas pour Hamlet, prince de Danemark, nous nous en sommes expliqués dans la fiche consacrée à cette pièce. Dans Les Girondins (Le chevalier de Maison-Rouge) et Une fille du Régent il apparaît bien que le tempo du roman n'est pas celui du drame, et que, les exigences du public différant sensiblement de celles des lecteurs, l'auteur opte pour un dénouement optimiste. C'est d'autant plus le cas dans cette dramaturgie nouvelle qui constitue ce que Fernande Bassan appelle les «romans-drames» de Dumas, distincte à la fois de l'esthétique classique de la tragédie (ou de la comédie), et de celle du drame romantique, et qui caractérise bien l'esprit du «Théâtre-Historique».

La pièce aura une ultime version, Le capitaine Lajonquière, créée le 23 septembre 1850, dernière pièce de Dumas jouée au Théâtre-Historique fermé le 16 octobre et mis en faillite le 20 décembre. La pièce ne fut jamais publiée.

Rappelons pour conclure qu'en 1975 Bertrand Tavernier porta à l'écran la conspiration du breton Pontcallec dans le film Que la fête commence, avec pour les rôles principaux Philippe Noiret, Jean Rochefort et Jean-Pierre Marielle.

François Rahier

© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
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