L'alchimiste Vous êtes ici : Accueil > Œuvre > Dictionnaire des œuvres
Page précédente | Imprimer

Titre L'alchimiste

Année de publication 1839

Genre Théâtre

Collaborateur(s) Gérard de Nerval (non crédité)

Epoque du récit XVIème siècle

Résumé L'alchimiste Fasio poursuit son grand œuvre pendant que sa femme Francesca se morfond au foyer, jalouse d'une courtisane, la Maddalena, et poursuivie par les assiduités du Podestat, deuxième personnage de l'État. Le vieil usurier Grimaldi, son propriétaire, veut le chasser et Fasio monnaie à prix d'or quelques jours de répit. Le laboratoire explose (Acte I).

Descendu pour mesurer l'étendu des dégâts, Fasio découvre un passage entre sa cave et celle où Grimaldi cache son or. Il assiste en secret au meurtre de Grimaldi par Lelio, son neveu, joueur ruiné venu réclamer sa part d'héritage. Découvert par Lelio, Fasio se voit offrir une grande partie de la fortune du vieillard. Il résiste d'abord à la tentation, puis cède (Acte II).

Fasio et Francesca habitent maintenant un véritable palais. L'ancien orfèvre que l'on croit enrichi par son art convie à un bal masqué la belle société florentine. La Maddalena paraît. Trompée par le podestat sur le comportement de son époux, Francesca s'enfuit (Acte III).

Elle trouve refuge dans l'atelier de l'alchimiste où la rejoint le podestat. Persuadée que sans son or il ne sera plus aimé de la courtisane, elle révèle au magistrat l'origine de la fortune. Celui-ci découvre alors le cadavre de Grimaldi et fait arrêter Fasio (Acte IV).

Il est condamné. Francesca implore en vain le podestat puis la Maddalena. Comme on conduit Fasio au supplice, Lelio se dénonce aux autorités comme le seul coupable. Bonheur retrouvé de Fasio et Francesca (Acte V).

Analyse Pièce créée le 10 avril 1839 au Théâtre de la Renaissance. Brodant sur un canevas romantique un peu conventionnel, Italie renaissante, souterrain, bal masqué et marche au supplice, Dumas et Nerval s'inspirent ici librement de la pièce de l'anglais Henry Hart Milman (1791-1868), Fazio, a tragedy jouée en 1815 sous le titre The Italian wife, elle-même adaptée d'une nouvelle de l'italien Antonfrancesco Grazzini (1503-1584), La storia di Fazio parue dans La prima e la seconda cena.

Mais il s'agit moins ici d'utiliser les ficelles déjà usées du vieux mélo (peu de coups de théâtre en effet dans L'alchimiste) que de mettre en scène un sujet qui, dans un autre décor, aurait fait de la pièce un drame bourgeois à la manière du XVIIIème siècle: l'histoire en effet est celle d'un couple, homme public, femme au foyer, que les tentations de l'un et les frustrations de l'autre malmènent et risquent de désagréger, et où tout finit par le triomphe de l'amour conjugal. Avec dix ans d'avance, c'est presque la théorie morale de dépassement du romantisme formulée par Dumas dans la préface du Comte Hermann.

Le contre coup du voyage en Allemagne, que les deux co-auteurs ont visitée l'année précédente, se fait sentir aussi. Dumas n'est pas le seul à avoir subi l'influence de la Dramaturgie de Hambourg de Lessing, Nerval penche également pour cette esthétique qui l'amènera plus tard à traduire Misanthropie et Repentir de Kotzebue (1855). Et l'on retrouvera le couple formé par le grand homme et son épouse délaissée dans Léo Burckart qui peut se lire à la fois comme un drame public et comme un drame privé (1838-1839) et dans L'imagier de Harlem (que Gérard fera jouer en 1851).

Reste à savoir qui de Dumas ou de Nerval s'implique davantage ici: Dumas qui écrit pour l'actrice Ida Ferrier (qu'il épousera en 1840 et avec qui il vivra deux ans en Italie) – mais qu'on ne peut confondre avec Francesca l'épouse délaissée de la pièce - ou Nerval qui écrit pour Dumas et ressasse peut-être ainsi ses amours malheureuses avec des actrices également, et peut-être la même Ida Ferrier?

Toujours est-il que la question semble avoir hanté les deux amis et qu'on la retrouve tout au long de leur commune collaboration, mêlée aux figures emblématiques de l'alchimiste Nicolas Flamel (cité ici dès le début de la pièce comme le maître spirituel de Fasio), et de son épouse Dame Pernelle, que Nerval esquisse dès 1830 dans un fragment dramatique, et que Dumas reprendra dans La tour Saint-Jacques jouée un an après la mort de Gérard. Nerval insiste davantage sur les souffrances de l'inventeur partagé entre la femme bourgeoise qui ne le comprend pas et l'idéal féminin (thème faustien inspiré par ses traductions de Geothe).

De ce drame mineur, signé du seul nom de Dumas, on attribue à Nerval le premier acte, traditionnellement recueilli dans ses œuvres. Gérard seul signera Léo Burckart joué en 1839; mais on verra dans la fiche (à venir) consacrée à cet ouvrage que la première version inédite (et révélée en 1949 par Jean Richer) doit beaucoup à Alexandre et s'inscrit dans le droit fil de son théâtre politique.

François Rahier

© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
Haut de page
Page précédente