Titre
Valentin-Valentine
Année de publication
1868
Genre
Théâtre (comédie en quatre actes, Théâtre
du Prince-Eugène, 24 février 1868)
Collaborateur(s)
Max de Bourdon (Mme Rosanna, ou Mme Meynier)
Epoque du récit
1859-1865
Résumé
L'action commence au château de Choisy, le 1er septembre 1859. Maurice,
vicomte de Nerlac, devenu Comte à la mort de son oncle, invite
ses amis à célébrer sa fortune retrouvée.
Parmi eux, Diane de Stell, qui aspire à devenir sa maîtresse.
Avant que l'on sonne le départ de la chasse, un coup de feu retentit,
et les gardes-forestiers amènent au comte un adolescent qu'ils
viennent de surprendre un fusil à la main. L'enfant révèle
au comte qu'il braconne pour aider sa grand-mère, elle et lui vivant
dans le complet dénuement. Ce garçon se révèle
vite une fille. Ému par son récit, et ses talents de fleuriste,
le comte s'engage à l'aider (Acte I). Deux ans plus tard, à
moitié ruiné par Diane qui est devenue sa maîtresse,
le comte reçoit de son banquier des conseils de prudence vis-à-vis
des femmes. Devenue fleuriste à Paris, au passage des Panoramas,
Valentine vient remercier le comte de sa bonté, et lui offre une
magnifique couronne de fleurs des champs. Amoureux décidément
de Valentine, le comte congédie sa maîtresse en lui offrant
une luxueuse parure de diamants (Acte II). Deux à trois ans passent.
Femme d'affaires qui vend des fleurs jusqu'aux Etats-Unis, Valentine songe
à se retirer. À nouveau ruiné, le comte, qui le lui
avait promis, passe voir la jeune femme au magasin. On le fait attendre,
Valentine étant en rendez-vous. Survient le banquier, agent de
ses mauvaises affaires, qui poursuit en vain Valentine de ses assiduités.
Il veut l'éviter, on le cache, puis il reparaît au moment
où le banquier devient menaçant pour Valentine. La fleuriste
et le comte en sont presque à s'avouer leur passion réciproque
(Acte III)... Mais, toujours la proie de son démon, ruiné
définitivement, devant tout vendre, le comte fait son testament,
puis lit des passages de Rolla d'Alfred
de Musset et prépare son pistolet. Il règle tout avec son
notaire, ne désirant pas assister aux enchères. Le garde-chasse
du comte pressent un malheur. Diane et le banquier entrent en scène,
désireux tous deux d'acquérir le domaine. Mais un nouvel
acquéreur double la mise, un ravissant petit marquis qui se révèle
être... Valentine ! Remportant l'enchère, elle offre le château
au comte : elle lui avait promis jadis de lui rendre la somme qu'il lui
avait avancée pour démarrer son affaire et elle le fait
au centuple. Valentine deviendra comtesse. Six ans se sont écoulés
depuis le début de l'action (Acte IV).
Analyse
Antépénultième pièce de Dumas, et dernière
non signée, cette comédie à laquelle on donne souvent
comme titre Valentin et Valentine, a
été en réalité jouée, et imprimée,
sous le titre exact de Valentin-Valentine.
L'identité de la jeune fille est révélée plus
tôt au lecteur qu'au spectateur car, dans le texte (coquille, ou
inattention du typo ?), le nom devient vite "Valentine", alors
qu'elle est encore supposée jouer un garçon. On retient
souvent de la pièce ce qu'en dit Georges D'Heylli dans son Dictionnaire
des pseudonymes paru en 1887, à propos du nom de Max de
Bourdon : "Auteur dramatique que la pièce Valentin
et Valentine [sic], et le petit scandale littéraire qu'elle
occasionna à propos d'une collaboration mal déguisée
d'Alexandre Dumas, ont mis un moment en évidence (février
1868). Ce Max de Bourdon est une dame Meynier, de Marseille, qui avait
d'abord pris le pseudonyme de Rosannah. Elle avait fait une comédie,
que Dumas retoucha et ne voulut pas signer sur l'affiche ; cris, récriminations,
injures même, tout fut mis en uvre pour obtenir que le célèbre
dramaturge se laissât afficher. Contre sa coutume, il fut inébranlable,
et Mme Meynier dut signer seule, du pseudonyme précité,
l'uvre qu'elle avait rêvé d'illustrer du nom, accolé
au sien, du populaire auteur de Monte-Cristo."
D'Heylli développe les quelques lignes que l'on trouvait déjà
chez Glinel (Alexandre Dumas et son uvre,
1884), une tradition que reprendra Reed. Mais dans une lettre du 21 février
1868 à Hippolyte Villemessant parue dans Le
Figaro le 22 février, et reprise dans Le
Dartagnan du 29, Dumas, qui écrit d'ailleurs lui aussi Valentin
et Valentine, avoue la paternité de la pièce : Mme
Meynier, qu'il ne connaissait que sous le nom de Mme Rosanna [sic], s'était
un jour présentée chez lui avec deux ou trois plans et une
pièce. Il avait jugé à l'époque les plans
inaboutis et la pièce injouable. Revenant à la charge, elle
lui proposa un autre plan, qui, dit Dumas, "cette fois, contenait
le germe d'une petite comédie innocente [
] Je vis la possibilité
de la faire jouer, et pour lui faire une surprise, au bout de trois jours,
je lui envoyais sa petite pièce écrite, ne lui demandant
pour tout service, que de ne jamais prononcer mon nom, attendu que je
ne faisais ni l'idylle, ni la pastorale". Promesse non tenue, d'où
le petit scandale littéraire évoqué par D'Heylli,
et la décision de Dumas "de fermer [sa] porte désormais
à tout collaborateur qui voudra, à l'aide de [son] nom,
ouvrir la porte d'un théâtre qui resterait peut-être
fermée pour lui". Dumas ne faisait ni dans l'idylle ni dans
la pastorale, certes. Mais la forêt, la chasse, le braconnage et
jusqu'au vieux fusil du père, sont bien de lui ! D'après
Claude Schopp, qui leur consacre deux notices séparées dans
son Dictionnaire Dumas, il n'y aurait
aucun rapport entre cette dame Meynier de Marseille, et Hyacinte Meinier
(Meinié) avec laquelle Dumas entretint une correspondance amoureuse
plus de trente auparavant. L'uvre a été publiée
par la Librairie dramatique l'année de sa création. Un in-18
de 72 pages dont peu d'exemplaires sont disponibles. Des deux que l'on
peut consulter à l'Arsenal, l'un est relié avec plusieurs
comédies de l'année, et l'autre, présenté
sous une couverture factice, qui est celle d'une pièce d'Edmond
Deslandes, Un gendre, publié en
1866. La date est simplement biffée et corrigée, et une
bande de papier blanc collée sur un tiers de la couverture porte
la mention manuscrite du titre, de la date et du lieu de la création
; le nom de l'auteur est suivi entre crochets de la mention " Pseudonyme
de Mr Alexandre Dumas père ".
François Rahier
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