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Titre Le père La Ruine

Année de publication 1860

Genre Roman

Collaborateur(s) Gaspard de Cherville

Epoque du récit 1793-1834

Résumé François Guichard est issu d'une lignée de braconniers tous morts par pendaison. Triste généalogie qui ne l'empêche pas d'exercer sa profession de pêcheur à La Varenne, terre du prince de Condé lovée dans un méandre de la Marne. Il épouse la jolie Louison dont il a trois enfants: ses deux fils sont tués dans les guerres napoléoniennes; sa fille et son mari sont massacrés par les Prussiens venus assiéger Paris. Louison meurt de chagrin. Son corps repose encore dans le lit conjugal quand les huissiers arrivent: la maison de Guichard, qui a été construite illégalement sur les terres du prince de Condé, doit être rasée. Fou de rage, Guichard part pour tuer Condé qu'il juge seul responsable. Mais Guichard n'est pas un assassin et le prince, magnanime, lui fait don du terrain.

Ses malheurs lui valent le surnom de père La Ruine. Misanthrope, il prend soin de sa petite fille Huberte qu'il appelle tendrement La Blonde. Quand La Varenne est vendue en parcelles, les amateurs de pêche à la ligne envahissent les lieux.

Attila Batifol est l'un d'entre eux. Contrefait, méchant et avide, le bonhomme, dont la laideur provoque l'hilarité d'Huberte, se croit autorisé à courtiser la jolie jeune fille qui lui administre un soufflet. Aiguillonné par cette résistance, il pense obtenir les faveurs de La Blonde par le chantage et fait interdire l'exercice de la pêche au vieil homme. Mais ce plan machiavélique ne prend pas en compte les talents de braconnier du père La Ruine.

Un jour, Attila surprend Huberte sur un îlot désert en train de rassembler la pêche de son grand-père. Sûr de son bon droit, il tente d'abuser d'Huberte qui ne peut se défendre. La pauvre jeune fille est sauvée in extremis par deux canotiers qui, mis au courant du despotisme exercé par Attila, arrachent à ce dernier un permis de pêche pour François Guichard.

Huberte et François Guichard se prennent d'amitié pour les deux hommes, Richard, sculpteur libertin et fainéant, et Valentin, bijoutier doux et honnête. Peu à peu, la rivalité et la jalousie brisent l'amitié des deux jeunes gens. Richard, plus stupide et insouciant que véritablement méchant, s'arrange pour éloigner son ami et décide la jeune fille à le suivre. Le père La Ruine, apprenant la fugue de sa petite-fille, la juge déshonorée et refuse de la revoir tant qu'elle ne s'est pas mariée.

Désespérée, Huberte part vivre à Paris avec Richard qui n'a nullement l'intention de l'épouser. Les mois s'écoulent et dans sa solitude Huberte prend conscience de son amour pour Valentin. Un jour, la jeune fille apprend que son grand-père se meurt de chagrin. Folle de désespoir, elle supplie Richard de lui rendre son honneur mais il refuse. Elle décide alors de s'asphyxier. A son retour, Richard découvre Valentin aux côtés d'Huberte qui semble morte. Ils se battent et Richard blesse mortellement Valentin.

Effrayé, il sort et revient avec un médecin. Il trouve alors Huberte serrant Valentin expirant dans ses bras. Devenue folle, La Blonde se jette dans la rivière où François Guichard retrouve son cadavre. Les amants malheureux sont mis en terre le même jour. Le père La Ruine n'a jamais aussi bien porté son surnom.

Analyse Le père La Ruine est un drame romantique tardif. Au début du roman, François Guichard, qui a profité des acquis de la Révolution, mène une vie rude, simple et champêtre. Pêcheur, issu d'une lignée de braconniers, c'est un homme de la nature qui vit dans un espace vierge et sauvage. Ses premiers grands malheurs coïncident avec la déliquescence du régime napoléonien: ses fils, son gendre et sa fille sont tués, sa femme meurt de chagrin.

La rencontre avec le prince de Condé, rare événement positif de la vie de Guichard, est placée sous le signe bénéfique de la nature et de la cynégétique.

Puis la corruption et le désastre, issus de la ville et de sa débauche, investissent la vie de Guichard. La Varenne est vendue en parcelles aux Parisiens avides de plaisirs champêtres. Parmi eux, Attila Batifol qui voudra abuser d'Huberte. Puis Richard, sculpteur au talent gâché, qui fera passer sa fantaisie et son orgueil avant le bonheur de La Blonde un moment éblouie par les lumières citadines. Même l'amour pur et sincère de Valentin ne parviendra pas à lutter contre l'influence délétère de la ville.

Le roman s'achève dans un ignoble gâchis: Richard tue Valentin et prend conscience trop tard de l'importance des vrais sentiments (amour et candeur d'Huberte, amitié inconditionnelle de Valentin); le noble Valentin, qui par grandeur d'âme avait préféré s'effacer devant le choix apparent d'Huberte, perd son ami et son amour; Huberte, qui porte le nom féminisé du patron de la chasse, troublée par l'insouciance de Richard, gâche l'amour de Valentin, désespère son grand père, perd la raison et se suicide. Seul reste le père La Ruine, dernier vestige d'un temps révolu.

Dans ce roman, Dumas prend plaisir à tourmenter ses personnages. Heureusement, sa verve et sa nature joviale ponctuent le récit de portraits burlesques tels ceux d'Attila Battifol et de ses acolytes. Cette histoire devrait plaire aux amoureux d'Alexandre, du moins s'ils parviennent à trouver l'ouvrage, qui n'est plus réédité depuis bien longtemps.

Delphine Dubois

© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
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