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Titre La conscience

Année de publication 1854

Genre Théâtre

Collaborateur(s) Paul Bocage, d'après Iffland

Epoque du récit 1810

Résumé L'action se déroule à Mannheim au début du XIXème siècle. Le contrôleur Alden se rend comme chaque trimestre au domicile du receveur Ruhberg pour vérifier ses comptes. Alden éprouve beaucoup d'affection pour Charlotte Ruhberg, et consent au mariage de son fils Frédéric avec la jeune fille, malgré la mauvaise impression qu'il a de la famille: père honnête mais faible, mère dépensière et fils joueur (Acte I).

La situation de la maison Ruhberg se dégrade en effet: on envisage de vendre la demeure familiale pour payer les dettes; ruiné, décrété d'arrestation, Edouard, le fils, vole 5.000 écus dans la caisse du receveur pour rembourser un créancier. À la découverte du larcin, le père tombe en syncope (Acte II).

Les derniers espoirs d'Edouard se sont envolés avec l'illusoire perspective d'un mariage avec une jeune fille de l'aristocratie. Il songe à se tuer, mais son père le lui interdit: le suicide rendrait impossible le repentir et l'expiation. Pendant qu'Edouard chassé par le père se prépare à l'exil, Alden confie à Charlotte et Frédéric une somme importante qui renflouera la caisse d'État, le reste constituant leur dot (Acte III).

Quatre ans plus tard nous retrouvons Edouard à Munich, sous le nom de Stevens. Reparti de rien, à force d'un labeur honnête, il est devenu conseiller influent du premier ministre du roi de Bavière. Celui-ci lui annonce qu'il marie sa fille adoptive Sophie au comte de Mendelstein. Cette nouvelle affecte fort Edouard qui aime éperdument la jeune Sophie (Acte IV).

Tourmenté par le remords, et alors qu'il sent que des intrigants sont sur le point de révéler sa faute passée pour entraîner sa chute, Edouard avoue tout à Sophie, voulant l'éloigner de lui; Sophie lui dit son amour (Acte V).

La situation se complique avec les révélations de Karl, le fils du ministre, qui aime aussi Sophie. En même temps, les intrigants semblent triompher. Mais tout se termine par un happy end: apprenant la générosité et le désintérêt d'Edouard, le ministre le fait anoblir par le roi, lui donne en mariage Sophie, qui était sa fille cachée et que Karl ne peut donc plus épouser. Pour le tableau final, le vieux Ruhberg réapparaît et donne son pardon.

Analyse Dans son «Post-scriptum» Dumas reconnaît que son drame est composé de deux pièces qui pourraient s'intituler «Le Crime» et «L'Expiation». Cette complexité, l'absence apparente d'unité d'action, des personnages qui doublonnent un peu, et la longueur de l'ouvrage (six actes) n'ont cependant pas nui à son succès, qui a été grand. La pièce sera d'ailleurs reprise sur le même théâtre en 1869.

La dédicace à Victor Hugo («C'est à vous, mon cher Hugo, que je dédie mon drame de La conscience. Recevez-le comme le témoignage d'une amitié qui a survécu à l'exil, et qui survivra, je l'espère, même à la mort. Je crois à l'immortalité de l'âme») témoigne, à l'époque, d'un réel courage politique. La réponse de Hugo exilé paraîtra dans Les Contemplations en 1856. Il est à noter que le célèbre poème de Hugo La conscience ne paraîtra que cinq ans plus tard dans La Légende des siècles.

Est-ce Dumas, alors, qui donna à Hugo l'idée que «dans un coin du cerveau de l'homme, sous la voûte de son crâne, une lumière [...] brûle pour lui seul, qui lui fait voir les vrais contours de la vie, [...] le bien, le mal, le juste, l'injuste» (Acte V, scène 1)? Ce ne serait pas le moindre intérêt de ce drame peu connu dans lequel Dumas opère un retrait par rapport au romantisme flamboyant des pièces historiques, au bénéfice d'une dramaturgie axée sur des thèmes de société ou des problèmes éthiques, proche en cela du théâtre de son fils.

Les préoccupations de Dumas à ce moment rejoignent aussi celles d'Iffland, son modèle, le dramaturge allemand du siècle précédent (1759-1814) dont il s'est inspiré pour cette pièce: Iffland était partisan comme Diderot d'un «drame bourgeois», moral, volontiers larmoyant dans l'évocation des scènes familiales, et une scène de la pièce de Dumas montrant le fils maudit aux genoux de son père semble inspirée des tableaux de Greuze sur la malédiction paternelle que Diderot aimait tant.

François Rahier
© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
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