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Chasseur


Homme aimable, jovial, bien portant, mangeant bien, buvant encore mieux, se couchant de bonne heure, se levant matin, dormant toute la nuit. En général les dames n'aiment pas les chasseurs. Tel est le portrait que trace des chasseurs, dans son livre du Chien d'arrêt, Elzéar Blaze, l'un des plus grands chasseurs devant Dieu qui aient existé depuis Nemrod.
Ce n'est pas sous ce rapport que j'examinerai le chasseur. Vous voyez de loin dans la plaine un homme armé d'un fusil et accompagné d'un chien ; s'il vous évite, c'est qu'il n'a pas de port d'arme, pas la permission de chasser sur le terroir où il se trouve ou pas de gibier dans sa carnassière. Il y a chasseur et braconnier.
Chasseur qui chasse pour le plaisir et la gourmandise.
Je me rappelle dans mes premières chasses avoir chassé souvent avec un fermier nommé Moquet. Quand il manquait une perdrix, il était rare qu'on ne l'entendît pas s'écrier : « Sapristi ! elle aurait été si bonne aux choux ! »
Et quand c'était un lièvre :
« Sapristi ! il eût été si bon aux petits oignons ! »
A ce chasseur, qui chasse pour le plaisir et par gastronomie, nous allons donner quelques conseils, non pas sur la manière de tenir son fusil, de mettre en joue, de diriger son chien, de marcher à contrevent, de chanter un petit air si on aperçoit un lièvre au gîte, mais sur la manière de placer le gibier tué dans sa carnassière.
La carnassière, le chasseur le sait, a deux séparations, l'une en cuir, l'autre en filet, celle en cuir est destinée à mettre dans les petites poches qui y sont pratiquées le port d'arme, la permission de chasse, les capsules et les lièvres, mais les lièvres seulement, pas d'autre gibier.
Si la carnassière du chasseur déborde, qu'il attache tout le menu gibier, cailles, cailletots, perdreaux, faisandeaux à l'extérieur avec des ficelles passées dans les mailles ; qu'il réserve le filet pour les perdrix, les faisans et les gros oiseaux qui ne craignent pas d'être froissés les uns par les autres ; s'il fait très chaud, qu'il ne mette jamais le lièvre dans le compartiment de cuir sans l'avoir fait pisser.
Qu'il ne mette jamais la perdrix ou le perdreau dans le compartiment de filet sans lui avoir, à l'aide d'une petite branche, ôté le gros intestin.
Tout chasseur qui ne sait pas comment cette opération se pratique, se la fera apprendre par un chasseur mieux renseigné.
Recommandation suprême : qu'il ne tire jamais une caille plus près que vingt ou vingt-cinq pas, la chair de la caille essentiellement délicate, déchiquetée par le coup de fusil, s'il fait chaud, n'arrivera pas mangeable à la maison ; mieux vaut manquer une caille, que l'on retrouvera plus tard, que de la rendre impossible à manger.
Les Italiens, sous ce rapport, sont mieux outillés que nous. Ils ont des carnassières dont le filet, bombé en osier, laisse passer l'air et ne presse pas le gibier ; le chasseur n'y perd rien comme amour-propre. Les mailles d'osier laissent voir le poil et la plume aussi bien que les mailles de fil.

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