Henri III et sa cour Vous êtes ici : Accueil > Accueil > Bibliothèque
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Scène 4

                              SCENE IV
Ruggieri, Saint-Mégrin, puis la duchesse de Guise.

                              Saint-Mégrin, poussant la porte.
Bien, bien... Revenant. Mon père,... un seul mot... M'aime-t-elle ?... Vous vous taisez, mon père... Malédiction !.. Oh ! faites... faites qu'elle m'aime ! On dit que votre art a des ressources inconnues et certaines, des breuvages, des philtres ! Quels que soient vos moyens, je les accepte, dussent-ils compromettre ma vie en ce monde et mon salut dans l'autre... Je suis riche. Tout ce que j'ai est à vous. De l'or, des bijoux ; ah ! votre science peut-être méprise ces trésors du monde ! Eh bien, écoutez-moi, mon père ! On dit que les magiciens quelquefois ont besoin, pour leurs expériences cabalistiques, du sang d'un homme vivant encore. Lui présentant son bras nu. Tenez, mon père... Engagez-vous seulement à me faire aimer d'elle...

                              Ruggieri.
Mais es-tu sûr qu'elle ne t'aime pas ?

                              Saint-Mégrin.
Que vous dirai-je, mon père ? jusqu'à l'heure du désespoir, ne reste-t-il pas au fond du coeur une espérance sourde ?... Oui, quelquefois j'ai cru lire dans ses yeux, lorsqu'ils ne se détournaient pas assez vite...Mais je puis me tromper.. Elle me fuit, et jamais je ne suis parvenu à me trouver seul avec elle.

                              Ruggieri.
Et si tu y réussissais enfin ?

                              Saint-Mégrin.
Cela étant, mon père !... son premier mot m'apprendrait ce que j'ai à craindre ou à espérer.

                              Ruggieri.
Eh bien, viens et regarde dans cette glace...On l'appelle le miroir de réflexion... Quelle est la personne que tu désires voir ?

                              Saint-Mégrin.
Elle, mon père !...
Pendant qu'il regarde, l'alcôve s'ouvre derrière lui et laisse apercevoir la duchesse de Guise endormie.

                              Ruggieri.
Regarde !

                              Saint-Mégrin.
Dieu !... vrai Dieu !... c'est elle !... elle, endormie ! Ah ! Catherine ! L'alcôve se referme. Catherine ! Rien... Regardant derrière. Rien non plus par ici... Tout a disparu : c'est un rêve, une illusion... Mon père, que je la voie... que je la revoie encore !...

                              Ruggieri.
Elle dormait, dis-tu ?

                              Saint-Mégrin.
Oui...

                              Ruggieri.
Ecoute : c'est surtout pendant le sommeil que notre pouvoir est plus grand... Je puis profiter du sien pour la transporter ici.


                              Saint-Mégrin.
Ici, près de moi ?

                              Ruggieri.
Mais, dès qu'elle est réveillée, rappelle-toi que toute ma puissance ne peut rien contre sa volonté...

                              Saint-Mégrin.
Bien ; mais hâtez-vous, mon père !... hâtez-vous !...

                              Ruggieri.
Prends ce flacon ; il suffira de le lui faire respirer pour qu'elle revienne à elle...

                              Saint-Mégrin.
Oui, oui ; mais hâtez-vous...

                              Ruggieri.
T'engages-tu par serment à ne jamais révéler ?...

                              Saint-Mégrin.
Sur la part que j'espère dans le paradis, je vous le jure...

                              Ruggieri.
Eh bien, lis...
Tandis que Saint-Mégrin parcourt quelques lignes du livre ouvert par Ruggieri, l'alcôve s'ouvre derrière lui ; un ressort fait avancer le sofa dans la chambre, et la boiserie se referme. Regarde !
                                                                      Il sort.

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