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Chapitre LV
Où l'on suit le travail de la fatalité

Deux mois s'écoulèrent. L'automne étendait déjà sur les bois et sur les champs son manteau doré, et un épais tapis de feuilles mortes éteignait le bruit des roues de la chaise de poste du baron d'Hermelinfeld, courant, par une grise journée d'octobre, sur le chemin de Francfort à Eberbach ; sans le fouet du postillon et les grelots des chevaux, la voiture eût passé silencieuse comme un vol d'hirondelle.
Du fond de sa voiture, le baron, soucieux et sombre, la tête appuyée sur sa main, regardait vaguement fuir les arbres et les buissons de la route. Tout à coup il vit, au sommet d'une colline rocheuse, une créature humaine partir comme une flèche et descendre ou plutôt tomber au-devant des chevaux et presque sous les roues en criant : « Arrêtez ! arrêtez ! »
Malgré le changement de ses traits et son air égaré, le baron reconnut Gretchen. Il fit arrêter le postillon.
- Qu'y a-t-il donc, Gretchen ? demanda-t-il inquiet. Serait-il arrivé quelque accident au château ?
- Non, répondit Gretchen avec un accent étrange, Dieu veille encore sur eux ; mais Samuel veille aussi. Vous arriverez à temps. Et cependant serez-vous puissant pour le bien comme l'autre pour le mal ? N'importe ! mon devoir est de vous avertir, même au prix de ma rougeur et de ma honte. Et, en vous voyant de là-haut, j'accours, parce que l'instinct du bien, que le démon n'a pu tuer en moi, m'ordonne de vous parler.
- Pas en ce moment, mon enfant, répondit avec douceur le baron d'Hermelinfeld. Le grave et triste événement qui m'amène à Eberbach ne me permet pas le moindre retard. Je n'ai pas une minute à perdre. Seulement, Gretchen, sais-tu si je trouverai mon fils chez lui ?
- Chez lui ? qu'appelez-vous chez lui ? répondit Gretchen. Croyez-vous donc qu'il soit le maître dans le burg ? Non, il n'est point le châtelain et sa femme n'est point la châtelaine. C'est pourtant elle qui vous a fait venir, peut-être ?... Est-ce elle qui vous a fait venir, dites ?
- As-tu le délire ou la fièvre, petite ? demanda le baron. Je ne sais ce que ces discours signifient. Non, ce n'est pas Christiane qui me fait venir. J'apporte à mes enfants une douloureuse nouvelle, mais je n'en ai pas reçu d'eux.
- Quand votre nouvelle serait une nouvelle de mort, reprit Gretchen, auprès de ce que j'ai à vous apprendre, elle ne serait rien. Car mieux vaut la mort certaine que le déshonneur possible !
- Le déshonneur ! Comment ! que veux-tu dire ? s'écria le baron frappé malgré lui du ton absolu et convaincu de la chevrière.
- écoutez, dit Gretchen ; en voiture, vous n'arriverez pas au château avant un quart d'heure. Descendez et prenez à pied ce chemin de traverse, je vous y conduirai en dix minutes. Et en route je vous dirai les secrets que ma conscience voudrait se taire à elle-même. Mais la mémoire du bon pasteur qui a sauvé ma mère m'ordonne de sauver sa fille. Il ne faut pas que M. d'Eberbach se brise la tête contre les murs du château maudit ; il ne faut pas que madame Christiane devienne folle comme la pauvre Gretchen ; il ne faut pas que l'enfant nourrisson de ma chèvre reste orphelin sous le ciel. Venez donc et je parlerai.
- Je suis à toi, Gretchen, dit le baron, saisi malgré lui de crainte.
Il descendit de voiture, donna ses ordres au postillon pour aller l'attendre au château, et, d'un pas jeune et vif encore, s'engagea avec Gretchen dans le sentier qu'elle lui indiquait.
- Je parlerai en marchant, dit Gretchen, d'abord parce que vous êtes pressé, et puis parce qu'ainsi aucun arbre et aucune haie de ma forêt n'entendra en entier mon récit de honte.
Elle tremblait de tous ses membres.
- Remets-toi, mon enfant, dit avec bonté le baron, et parle sans crainte à un vieil ami, à un père.
- Oui, vous êtes un père, dit Gretchen, et vous m'aiderez dans ma confusion. Vous savez, je crois, monsieur le baron, quelles terribles menaces nous avait faites à madame Christiane et à moi, ce réprouvé, ce haïsseur, ce Samuel Gelb, puisqu'il faut prononcer son nom.
- Je le savais, oui, Gretchen. Mon Dieu ! s'agit-il encore de Samuel ? Parle, parle, mon enfant.
- Monsieur le baron, reprit Gretchen en cachant son front dans ses mains, Samuel Gelb, vous le savez, avait juré que toutes deux nous l'aimerions, ou, pour le moins, que nous serions à lui. Eh bien !... eh bien ! il a déjà tenu parole avec moi.
- Comment ! Gretchen ! tu l'aimes ?
- Oh ! je le hais ! s'écria Gretchen avec une sauvage énergie. Mais il y a eu un jour, il y a eu une heure où il a bien su me forcer, le suppôt de l'enfer... je ne sais pas si c'est à l'aimer ! mais enfin, que ma mère me pardonne ! je suis à lui.
- Est-ce possible, Gretchen ? Gretchen ! as-tu toute ta raison ?
- Oh ! si je pouvais ne pas l'avoir ! Mais malheureusement je l'ai, monsieur, tout comme ma conscience, tout comme ma mémoire. Il n'y a qu'une chose dont je doute. Vous, monsieur le baron, vous êtes savant. éclairez mon pauvre esprit obscur. J'ai l'air de ne parler que de moi, mais c'est pour la femme de votre fils que je parle. Ainsi, dites-moi la vérité comme je vous la dis. Monsieur le baron, est-ce que le Dieu de douceur et de miséricorde a laissé dans ce monde à la portée des méchants des armes et des prises contre les bons que les bons ne puissent éviter ? Y a-t-il des forces infernales qui puissent contraindre une âme honnête et innocente au crime ? Y a-t-il des magies invincibles qui fassent que l'on tache même ce qui est pur, et que l'on possède même ce qui vous abhorre ?
- Explique-toi, mon enfant.
- Monsieur le baron, reprit Gretchen, examinez cette petite fiole que j'ai trouvée un soir à terre dans ma cabane.
Le baron d'Hermelinfeld prit la fiole de platine que lui tendait Gretchen, la déboucha et la respira.
- Grand Dieu ! s'écria-t-il, as-tu donc bu de cette liqueur ?
- Quand j'ai aimé Samuel malgré ma haine, monsieur le baron, j'avais, la veille et le jour même, trouvé à mon pain et à mon lait l'odeur de cette fiole.
- Oh ! la malheureuse ! Oh ! le misérable ! s'écria le baron.
- Eh bien ! qu'est-ce que vous dites, monsieur ?
- Je dis, pauvre enfant, que ta volonté a été contrainte, enivrée, aveuglée. Je dis que le crime a été double pour l'autre et nul pour toi. Je dis que tu es innocente malgré ta faute et pure malgré ta souillure.
- Oh ! merci ! s'écria Gretchen en joignant les mains avec une expression de joie radieuse. Ma mère, je n'ai donc pas manqué à mon vœu ! Soyez béni, mon Dieu, dans le ciel ! et vous, monsieur, soyez béni sur la terre !
Mais elle reprit soudain, découragée :
- C'est égal ! il y a des mystères terribles. L'âme est intacte et le corps ne l'est plus. Et j'ai beau être blanche en dedans, je n'en suis pas moins souillée.
- Console-toi, calme-toi, pauvre petite ! Les anges ne sont pas plus purs que toi. Encore une fois, cet infâme a tout fait et tu n'as pas besoin d'achever la triste confidence, je devine le reste. Il s'est introduit chez toi, de nuit, comme un malfaiteur. Il a profité de la solitude et de ta confiance, le lâche ! Oh ! mais nous le punirons, sois tranquille.
Gretchen releva sa tête triste et fière, comme pour secouer son souci.
- Ne pensons plus à moi, dit-elle, mais à votre fille.
- Christiane, reprit le baron, est, Dieu merci, moins exposée que toi, pauvre enfant ! Christiane, elle, n'habite point, toute seule, une cabane ouverte, mais un château clos de hautes murailles et peuplé de domestiques dévoués qu'elle peut appeler et qui peuvent la défendre, si son mari était absent.
- Vous croyez cela ? dit Gretchen avec un sourire d'amertume. Est-ce que Samuel Gelb n'ouvre pas toutes les portes du château qui s'ouvrent avec des clefs, et même toutes les portes qui s'ouvrent sans serrures ?
- Quoi ! Gretchen, Samuel Gelb a-t-il, que tu saches, pénétré dans le château ?
- Et comment celui qui l'a bâti n'y serait-il pas entré ?
- Celui qui l'a bâti ? répéta le baron stupéfait.
- Je puis tout vous dire, à présent, reprit Gretchen. Son crime m'a déliée de mon serment et ma petite biche, sur laquelle le monstre devait se venger, est morte le mois dernier. Nous voici déjà en vue du burg. écoutez bien, monsieur le baron.
Et elle raconta comment Samuel avait construit le château double.
- Oh ! quelle audace ! s'écria le baron. Et Christiane ne sait-elle rien de tout cela ?
- Elle sait tout, mais elle m'avait juré le secret.
- N'importe ! dit le baron, dans le danger qu'elle court, comment, selon sa promesse, ne m'a-t-elle pas écrit ? Merci toujours, Gretchen, merci de ta confiance. Va, elle ne sera pas perdue. Tu me laisses cette fiole, n'est-ce pas ? et je tiens le misérable, j'espère.
- Si vous le tenez, ne le lâchez pas ! dit Gretchen dont les yeux s'allumèrent de courroux. Oh ! que je le hais ! Quel bonheur que j'aie le droit de le haïr ! Je ne vis plus que pour le voir châtier un jour. Et cela sera, si ce n'est par vous, par Dieu.
Elle reprit :
- Nous voici à la poterne du château, monsieur le baron, et moi je retourne à mes chèvres. J'ai fait mon devoir, faites votre œuvre.
- Adieu, Gretchen, dit le baron, je croyais n'être appelé au château que par un malheur, je l'étais aussi par un danger, j'ai maintenant deux raisons pour me hâter. Adieu.
Il s'achemina d'un pas rapide vers le burg. Le premier domestique qu'il rencontra lui apprit que Julius était parti, il y avait deux heures, après le dîner, un fusil sur l'épaule, et qu'il devait chasser jusqu'au soir. Mais madame d'Eberbach était au château. Le baron témoigna une vive contrariété. Il poursuivit sa route jusqu'à l'appartement de Christiane, sans vouloir qu'on l'annonçât.
Quand, après avoir frappé, il entra dans la chambre de Christiane, il la trouva absorbée par cette grande occupation des mères qui consiste à faire sourire les enfants. Christiane jeta un cri de surprise en reconnaissant son beau-père et s'élança au-devant de lui. Le baron l'embrassa tendrement. Il fit aussi mille caresses à son petit-fils, qu'il trouva bien portant et charmant.
- Oui, il est beau, n'est-ce pas, mon Wilhelm ? dit Christiane. Il n'y a pas, je crois, beaucoup d'enfants aussi beaux. Imagineriez-vous qu'il me comprend déjà quand je lui parle ? Oh ! je l'aime ! Allons souriez donc aussi à votre grand-père, vilaine figure fraîche et rose !
- Il est ravissant, chère fille, il te ressemble, dit le baron. Mais donne-le à sa nourrice. J'ai à causer avec toi sérieusement et je crains une telle distraction. Julius est donc dans la forêt ? demanda-t-il.
- Mon Dieu ! oui, il chasse.
- Sait-on où ? Peut-on le retrouver ?
- On peut essayer, du moins, dit Christiane.
- Eh bien, qu'on essaye, n'est-ce pas ? J'ai des choses graves et urgentes à lui dire.
Christiane appela et donna l'ordre à trois domestiques de fouiller chacun un côté du bois et de ramener Julius.
- Mais qu'y a-t-il donc ? demanda-t-elle inquiète au baron.
- Rien, répondit le baron soucieux. C'est à Julius du moins qu'il faut que je le dise. Nous en parlerons donc quand il sera rentré. Parlons de toi, en attendant. Tu ne m'as pas écrit ?
- Mais si fait, cher père, dit Christiane.
- Ah ! oui, des mots de bonne affection au bas des lettres de Julius. Mais je veux dire pas de lettre de toi à moi.
- Pardonnez-moi, mon père, je vous ai écrit, il y a deux mois et demi, une longue et pressante confidence.
- Mais je n'ai rien reçu de semblable, dit le baron étonné. Attends donc, pourtant. Oui, il y a deux ou trois mois, il m'est arrivé, en effet, une enveloppe timbrée d'Heidelberg, mais qui ne renfermait qu'une feuille blanche. J'en ai même écrit à Julius ; il m'a répondu qu'il ne savait ce que je voulais lui dire.
- Oh ! je suis bien sûre d'avoir mis la lettre dans l'enveloppe, dit Christiane. Je me vois encore là à ce bureau, l'écrivant, la cachetant. Mon Dieu ! a-t-il donc pu encore venir la soustraire ?
- Qui ? demanda vivement le baron.
- Celui au sujet duquel je vous écrivais.
- Samuel Gelb ?
- Oui, Samuel Gelb, mon père.
Il y eut un moment de silence. Christiane, frappée, songeait à cette nouvelle audace de Samuel. Le baron observait sa bru.
- As-tu donc revu ce Samuel ? demanda-t-il.
- Hélas ! oui, deux fois.
- Ici ? reprit le baron.
- Non, dehors, reprit après un moment d'hésitation Christiane.
Elle se rappelait que le baron avait expressément défendu à son fils de recevoir Samuel et elle mentait pour absoudre Julius.
- Et que t'a dit Samuel ? demanda encore le baron.
- La première fois, il m'a renouvelé ses insolents défis.
- Le misérable !
- C'est alors que je vous ai écrit, mon père, pour vous demander secours, pour vous appeler. La seconde fois que je l'ai revu, c'était huit ou dix jours après, à une représentation publique.
Et Christiane raconta au baron l'émigration des étudiants et la représentation des Brigands. Elle rejeta toute la faute sur sa curiosité de femme : c'était elle qui avait eu envie d'assister à cette fête et qui y avait entraîné Julius. Julius avait cédé par complaisance pour sa femme. Samuel, du reste, avec qui elle avait échangé quelques mots après la pièce, avait juré qu'il ne reparaîtrait devant elle qu'appelé par elle. Et, bien entendu, elle ne le rappellerait jamais !
Le lendemain, les étudiants étaient repartis pour Heidelberg.
- Depuis deux mois, ajouta Christiane, M. Samuel a scrupuleusement tenu parole. C'est pourquoi, surprise de ne pas recevoir de vous de réponse, je ne vous ai pas écrit de nouveau. Pendant ces deux mois, ni la vue, ni le souvenir, ni même le nom de cet homme n'ont troublé mon bonheur. Car je n'ai jamais été, en réalité, plus heureuse et plus calme que maintenant. Wilhelm n'a plus eu la moindre atteinte de son indisposition et Julius ne se ressent pas non plus de cette langueur que la solitude avait d'abord jetée dans sa vie accoutumée au mouvement et au bruit. Enfin, continua Christiane en souriant, le père et l'enfant sont tout à fait guéris. Et moi qui ne vis qu'en eux, et qui suis moitié Wilhelm, moitié Julius, l'amour de Julius et la santé de Wilhelm font mon bonheur tout entier. Je remercie Dieu chaque jour et je ne voudrais pas d'autre paradis que mon présent éternisé.
- Et Gretchen ? dit tout à coup le baron.
Christiane tressaillit.
- Gretchen ! reprit-elle triste et songeuse. Gretchen ne se montre plus à personne. De sauvage qu'elle était, elle est devenue farouche ; de chèvre, elle est devenue biche. Tout contact avec des créatures humaines lui semble tellement insupportable, que, pour n'avoir plus à conduire au château la chèvre qui nourrit Wilhelm, elle ne l'emmène plus avec son troupeau. La chèvre reste au château et les domestiques s'en chargent. Les gens de Landeck qui ont eu à échanger quelques mots avec Gretchen disent que sa raison paraît s'être égarée. Pour moi, je suis allée cinq ou six fois à sa cabane pour tâcher de la voir, mais j'ai eu beau frapper et appeler, jamais Gretchen n'a répondu. Je l'ai rencontrée souvent de loin quand je sors avec Wilhelm. Toujours du plus loin qu'elle m'aperçoit, elle s'enfuit dans les profondeurs de la forêt.
- C'est étrange ! dit le baron, je ne suis, moi, à Eberbach que depuis une demi-heure et Gretchen m'a abordé la première et m'a longuement parlé.
- Et que vous a-t-elle dit ?
- Tout. Le crime de Samuel, ses projets, son impudence. Il a bâti ce château ; il y peut pénétrer à toute heure, et ce n'est pas dehors, c'est ici, Christiane, qu'il vous a vue.
- Eh bien ! mon père ?
- Eh bien ! vous ne m'avez pas dit toute la vérité, Christiane.
Un sourire de dignité triste effleura les lèvres de Christiane. Mais elle ne se justifia pas.
Le baron se leva, en proie à une violente émotion, et marcha à grands pas dans le salon.
- Je verrai Samuel, dit-il, et je lui parlerai. Qu'il prenne garde à lui. Cette fois, je ne me bornerai pas à des phrases. Dès que j'aurai causé avec Julius, je me mettrai en route et, ce soir même, je serai à Heidelberg.
- Pardonnez-moi, mon père, dit Christiane, mais je vous prie de réfléchir avant de faire cela. Je vous ai déjà dit que depuis deux mois cet homme nous laisse en paix. Est-il prudent de l'exciter et de le réveiller ? Je vous avoue que j'ai peur, comme si vous me parliez de frapper un tigre endormi.
- Avez-vous donc des raisons particulières, Christiane, pour craindre cette démarche ?
Christiane rougit offensée.
- Les hommes, dit-elle comme à elle-même, ne savent pas, avec leurs étranges soupçons, ce que c'est que la pudeur d'une femme, et que plus le lac est uni, plus aisément un souffle le ride.
- Si vous voulez voir Samuel Gelb, monsieur le baron, vous n'avez pas besoin d'aller à Heidelberg et d'attendre à ce soir pour cela.
- Comment ? dit le baron.
Christiane alla droit au panneau que lui avait indiqué Samuel et posa le doigt sur le bouton.



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