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Chapitre LXVII
Mailly se trouble

Il est plus facile d'imaginer que de peindre les souffrances de Mailly après le départ de Richelieu.
Amant et mari, il voyait sa femme, sa maîtresse, toutes deux menacées. La femme n'est rien jamais pour l'infidèle qu'au moment où il s'aperçoit que d'autres yeux l'ont distinguée; mais, à ce moment-là, la femme c'est la propriété, c'est le nom, c'est l'honneur, c'est tout. à ce moment, quelle précieuse possession que la femme, et comme tout ce qu'on a dédaigné reparaît brillant, comme la raison d'aimer revient avec la raison de haïr!

En un moment, M. de Mailly fut jeté dans les extrêmes. Il se représenta sur-le-champ sa femme qu'il avait laissée isolée, désespérée, solitaire. Il se représenta sa femme adulée, courtisée, encensée. Un coup de poignard rougi lui traversa le cœur.
- Céder ma femme! se dit-il, céder mon bien à celui qui ne peut me prendre que la vie! Jamais!
Puis il s'arrêta.

- Mais, pensa-t-il, ces artisans d'intrigue et de corruption me l'ont bien dit, le roi est bon, il ne veut pas tout prendre à un malheureux gentilhomme. De deux convoitises, il négligera l'une pour laisser quelque chose à M. de Mailly. Le roi est un modèle de continence et de vertu. C'est Scipion ou Alexandre ce jeune monarque. Heureux Mailly! va. Le roi ne te prendra que ta femme ou ta maîtresse. C'est à toi de choisir celle qu'il te plaît de te laisser prendre. Ta femme si tu veux, ta maîtresse si tu veux. Quelle générosité! En effet, pourquoi aurais-tu à la fois une femme et une maîtresse? C'est un cumul que la morale repousse.
Et le roi, élevé par M. de Fréjus, le roi est si moral!
Il n'y a de patriarche en France que Sa Majesté. Le roi seul peut se faire un sérail s'il lui plaît. Tu as une maîtresse qui t'aime et une femme que tu croyais devoir aimer. Point! le roi te prouvera bien que c'est trop; il te le prouvera, soit par la Bastille, soit par Vincennes, soit par tout autre moyen.
Il te le prouvera en t'envoyant les capitaines des gardes armés de longues flamberges.
Il te le prouvera en t'envoyant ses diplomates cuirassés de protocoles et de subtilités.
Il te le prouvera par l'exil.
Il te le prouvera comme David le prouva pour Bethsabée à Urie, pardieu!
Il a non seulement pour lui l'exemple de Louis XIV, mais encore l'exemple de David.
à la première affaire contre les Espagnols ou les Anglais, on t'assignera une place si bien choisie, qu'un fourneau jouera sous tes pieds, comme il arriva à M. de Beaufort devant Candie.
Ou bien tu seras tué par un chasseur espagnol, en face, bravement, sort de la guerre.
Ou tu recevras la balle d'un de tes grenadiers dans les reins, maladresse regrettable qui fera pleurer les gens sensibles, lecteurs de gazettes. Mailly! Mailly! la situation est grave!
Elle est grave surtout, parce qu'elle annonce des appétits violents dans ce jeune prince que la France, d'une voix unanime, appelle le Bien-Aimé.
Pauvre femme! quand elle le connaîtra mieux! Sa femme à lui, ma femme à moi, et ma maîtresse! Marie Leczinska, Mme la comtesse de Mailly et Olympe de Clèves! tout cela pour un adolescent, c'est grave! Oui, Mailly! c'est grave, et que fera-t-il donc à trente ans, et surtout à soixante?
Combien de gens, en pareille occurrence, ont fermé les yeux, comme disait ce matin M. le duc de Richelieu, gens prudents, habiles à se conduire, et dont les affaires n'ont pas discontinué de marcher dans une bonne voie, sous la double impulsion de ces deux excellents moteurs si puissants qu'on appelle une belle femme et une belle maîtresse!
Ah! ceux-là sont les habiles!
Il est certain que si je n'adopte pas ce parti; que si je veux toujours continuer, comme dit ce même duc de Richelieu, un habile aussi; que si je veux mépriser ma femme, rire d'elle et du roi, me faire un parti parmi les vieux courtisans rechignés qui jappent à la vertu; que si je veux me refondre et me faire du dernier siècle ou plutôt des années de Mme la marquise de Maintenon, on m'appellera Montausier, Navailles, Montespan et que je serai béni dans les almanachs qui s'impriment en Hollande; il est certain que si je pousse l'esprit de résistance jusqu'à subir l'exil, jusqu'à faire des remontrances au roi, jusqu'à demander justice à la reine, le rôle devient magnifique.
Avec un peu de tact - j'en ai, Dieu merci! - je mets Sa Majesté offensée de mon bord, je conspire avec Marie Leczinska contre ma femme, et je me fais rouler à la Bastille escorté de tous les maris malheureux et trompés, qui feront de moi leur César ou leur Pompée.
De là, réhabilitation après l'exil, dignités pleuvant sur moi après la Bastille, ou du moins une renommée capable de faire pâlir tous les vainqueurs de ce siècle rapetissé.
Autre chose. Pas de bruit, pas d'esclandre; ce qui convient mieux à un homme de bon goût, séparation authentique, remplaçant cette petite ébauche de divorce que Louise et moi nous avons faite sous seing privé; exhérédation des enfants soi-disant légitimes qui pourraient naître; tout cela bien secret et bien en règle. Me voilà une vie toute de repos et toute d'honneurs. Nul ne rira du roi, devant lequel je me serai incliné. Nul ne rira de moi, qui aurai fait respecter mon nom. Ma femme ne sera plus ma femme, on la débaptisera: on l'appellera la bien-aimée du bien-aimé.
Quoi de mieux!
Non, non, il ne sera pas dit qu'un gentilhomme français, quand il aura fait don de son nom à une femme, se verra forcé de renier cette femme. Moi, comte de Mailly, j'ai une femme, j'ai pris une femme; de par ma volonté, de par la loi, de par l'église. Le roi Louis XV ne me prendra pas ma femme; non, je ne le veux pas!
Mais Olympe, mais ma maîtresse, c'est autre chose, malheureusement. J'ai une maîtresse, et ce n'est pas ni de par la loi, ni de par l'église; mais c'est cependant un droit consacré par la coutume. Il est sans exemple dans la noblesse, depuis cent ans, qu'un homme se passe d'une maîtresse.
Oui, mais s'il est sans exemple qu'un homme se passe d'une maîtresse, il est sans exemple aussi qu'une femme se passe ...
Ici Mailly s'arrêta.
- Qu'allais-je dire! s'écria-t-il; je me condamne moi-même. Oui, cela est sans exemple; eh bien! moi, moi, comte de Mailly, je l'empêcherai pourtant. A moi, à moi aussi l'arbitraire, puisque les autres veulent en chercher pour eux le monopole.
Là-dessus Mailly, tout tremblant, tout bouleversé, tout pâle, remonta prendre son épée, et, sans réveiller Olympe, qui dormait dans un calme profond, il courut comme un trait chez la comtesse de Mailly. Louise était revenue doucement dans son carrosse à la suite du roi, bercée sur les coussins, seule, toute à ses pensées.
Louise était ravie des souvenirs de la veille. Caressée des espérances de l'avenir, elle n'avait pas cessé depuis Rambouillet de poursuivre le doux rêve qu'inspire à la jeunesse pleine de sève l'amour naissant au milieu de la liberté.
Ce n'était pas que la comtesse pensât positivement ce que déjà pensait Richelieu. Non. Nature choisie, chaste et réservée, toute prête aux élans que lui conseilleraient l'amour véritable, la passion bien placée, Louise ne se forgeait rien de chimérique dans sa pensée; elle sentait bien qu'il y avait en elle de quoi pouvoir réaliser tout ce que les circonstances amèneraient.
Elle avait repris possession de son hôtel comme si jamais M. le comte de Mailly n'eût dû y revenir. Ce passé pour elle, ce mariage, cette bénédiction nuptiale donnée en présence des familles de Mailly et de Nesle, c'était un fossé insignifiant qui coupait sa vie de l'année précédente à l'année prochaine, et voilà tout.
Louise de Nesle ne comptait plus sur le comte de Mailly.
Les rêves de la journée qui venait de s'écouler lui avaient fait oublier l'époux.
Elle n'avait contre le comte de Mailly rien d'amer, rien d'hostile, rien de haineux. Le comte se serait présenté devant elle qu'elle l'eût appelé son ami, sans forcer en rien sa bouche ni son esprit à mentir.
Quant au cœur, nous n'en faisons pas mention, le cœur n'entrant pour rien dans les affaires de M. le comte de Mailly, époux de Mlle de Nesle et amant d'Olympe de Clèves, et de madame la comtesse éprise du roi Louis XV.
Soudain le comte lui fut annoncé par cette femme que nous avons vue sourire à Bannière. M. de Mailly arrivait précipitamment à l'hôtel.
Elle se leva étonnée, regarda aux vitres, et aperçut effectivement M. de Mailly qui gravissait les degrés du perron avec la vitesse d'un homme troublé.
Une minute après, le comte entrait chez elle. Louise4 poussa un cri de surprise.
- Vous! dit-elle.
- Oui, madame, moi.
La camériste ouvrit des yeux plus grands et plus interrogateurs encore que ceux de sa maîtresse.
M. de Mailly vit ces yeux-là dans une glace.
- Veuillez congédier mademoiselle, dit-il.
La camériste sortit, très décidée à écouter à la porte.
Le comte la suivit des yeux jusqu'à ce que la porte fût refermée. Puis il se tourna vers sa femme.
- Maintenant, demanda celle-ci, qu'avez-vous, monsieur le comte, et à quelle circonstance inattendue dois-je le bonheur de vous voir'?
- à une circonstance grave, madame.
- Oh! mon Dieu! vous m'effrayez!
Mailly sourit amèrement: il avait jugé, à tout hasard qu'un sourire amer ne pouvait jamais mal faire.
- Asseyez-vous, je vous prie, continua la comtesse; serais-je assez heureuse, monsieur, pour vous être, depuis hier, devenue bonne à quelque chose?
- Vous m'êtes devenue ... indispensable.
Ce fut Mme de Mailly qui sourit à son tour.
- Et à quoi donc, bon Dieu! Parlez, je vous prie.
- Vous ne vous doutez pas de ce qui m'amène ?
- Non! ce qui fait que je suis pleine de curiosité.
- Madame, savez-vous ce que l'on dit?
- Où ?
- Partout.
- Dites ce que l'on dit partout, monsieur, j'écoute.
- Eh bien! on dit que le roi. .. Ah! vous rougissez déjà.
- Monsieur, si vous continuez à me regarder de la sorte, non seulement je rougirai, mais encore je pâlirai. Ainsi, je vous en supplie, monsieur, laissez là ces airs de lieutenant de police et poursuivez. Que dit-on du roi?
- On dit que le roi... que le roi...
- Achevez.
- Que le roi a jeté les yeux sur certaine dame pour passer avec elle le temps qu'il ne passe pas avec la reine.
- Ah! l'on dit cela, répondit Mme de Mailly fort troublée.
- Vous avez dit vrai, s'écria le comte; Ah! voilà que vous pâlissez, madame. Louise se leva.
- Monsieur, dit-elle, je ne sais trop quel peut être le but de la méchante comédie que vous venez me faire jouer ici: toutefois, sachez, avant de la pousser plus loin, qu'elle n'est aucunement de mon goût.
- Oh! madame, dit Mailly, acceptez-y toujours un rôle, je vous prie.
- Nullement, monsieur. Je n'ai point l'habitude de répondre aux choses que je ne comprends pas.
- Oh! soyez tranquille, je vais me faire comprendre. Cela ne sera pas long. Cette dame que le roi aurait choisie, on voudrait savoir si elle agréera les hommages du roi; et, comme vous la connaissez, on me charge de vous demander votre opinion.
- Voilà, monsieur, une triste commission pour un bon gentilhomme. Je suis surprise, vous connaissant, que vous l'ayez acceptée.
- Je vous prie de ne pas vous aigrir, madame; vous jugez trop vite. Si j'ai accepté la commission, j'avais mes motifs.
- Lesquels, monsieur?
- Je connais aussi cette dame.
- Alors, faites la commission vous-même.
- Je la fais. Cette dame, c'est vous,
- Moi! s'écria Louise; c'est moi que le roi recherche!
Elle prononça ce peu de mots avec une si imprudente vivacité, que Mailly, s'il n'avait pas été aussi aveugle, n'eût pas attribué son mouvement à de la colère.
- Vous-même, répéta-t-i1.
Elle demeura quelques instants absorbée.
- Voilà qui est impossible, dit-elle enfin.
- Veuillez me croire bien informé.
- Oh! par qui?
- Peu vous importe. Ce que vous cherchez, ce n'est pas cela; vous voudriez peut-être qu'on vous instruisît davantage.
- Je ne vous comprends plus.
- Un mari qui parle, ce n'est jamais compréhensible.
- Mais, monsieur, vous oubliez que vous n'êtes pas mon mari!
- Trêve de plaisanterie, madame.
- Comment, trêve de plaisanterie! et notre acte?
- Notre acte, notre acte, reprit Mailly embarrassé; eh! madame, j'ai pu jouer hier un jeu qu'il ne me convient plus de jouer aujourd'hui.
- C'est moi qui vais vous prier de parler toujours, afin que dans toutes ces paroles j'en trouve une qui puisse me satisfaire.
- Ce ne sera pas long. Le roi vous recherche, dit-on, madame, et je présume que c'est là l'origine de toutes ces bouderies, de toutes ces fiertés que vous m'avez fait subir depuis longtemps.
- Moi, des bouderies! moi, des fiertés!
- Oh! vous nierez, je le comprends; une pareille perfidie vaut qu'on s'en excuse.
- Monsieur le comte, vous oubliez que vous parlez à une femme.
- Je ne parle pas à une femme, je parle à ma femme, ce qui est bien différent.
- Eh! monsieur, il n'en était plus question hier.
- D'accord, mais il en sera question aujourd'hui, aujourd'hui que je puis être ridicule par vous. Il n'était question hier que d'être malheureux ...
- Distinction subtile.
- Distinction qui convient à ma logique; je m'en sers comme je puis. Donc, madame, s'il vous agrée que le roi vous offre ses hommages, veuillez me le dire.
- Je pourrais vous répondre, monsieur.
- C'est ce que je vous demande, madame.
- Je serai plus sage que vous n'êtes fou.
- Ah! vous niez que le roi. ..
- Je ne nie absolument rien, monsieur; le roi fait ce qu'il veut. Parlez-lui et il vous répondra.
- Voilà une rare hardiesse.
- Vous trouvez?
- Libre d'hier, prenez garde! vous êtes trop émancipée aujourd'hui.
- Libre d'hier, je suis aujourd'hui telle que je veux être demain, telle que je serai toujours. Cette situation, c'est vous qui l'avez créée: subissez les conséquences.
- Les conséquences, quand ces conséquences sont le déshonneur!
- Oh! monsieur, nous n'en sommes pas là.
- Madame, n'allons pas plus loin; je vais m'adresser à votre probité: répondra-t-elle?
- Toujours! Seulement, prenez garde! la probité d'une femme, c'est la franchise.
- J'accepte. Le roi vous plaît-il?
- Beaucoup, monsieur.
- Voilà de la franchise, s'écria le comte avec un sourire forcé.
- Vous me l'avez demandée, et je vous l'ai promise.
- Et vous en aurez jusqu'à la fin?
- Jusqu'à la fin.
- Je poursuis.
- Prenez garde!
- Toujours l'oiseau de malheur prophétique. Vous ne me lasserez pas, Louise.
- Tant mieux, aveugle!
- Si le roi vous offre ses hommages, qu'êtes-vous décidée à faire?
- Monsieur, par pitié! ne me faites pas répondre à de pareilles impertinences.
- Vous oubliez que je me suis fait ambassadeur et que j'ai accepté les conditions de franchise.
- Alors, vous insistez?
- J'insiste.
- Eh bien! monsieur, je suis libre; j'ai reçu un congé détourné de mon mari, qui a pris une maîtresse lorsque j'avais à peine eu le temps de l'appeler mon mari . Je suis jeune, on me dit belle, j'ai un cœur et des yeux, tout cela m'appartient; dès que je suis libre, je mettrai à profit yeux et cœur.
- Vous aimerez?
- Si j'aime, oui.
Mailly, en face de cette singulière femme qui se révélait à lui si fièrement, poussa la colère jusqu'à la menace.
- Madame, s'écria-t-il à son tour avec un geste violent, à votre tour, prenez garde!
- Comte, dit-elle froidement, vous allez achever de me donner raison.
Mailly s'arrêta dompté.
- Je vois, reprit-il après un moment d'hésitation qui lui permit de rappeler ses esprits, je vois la réponse que j'aurai à faire. Madame, vous aimez le roi.
- C'est vrai.
- Me ferez-vous l'honneur de me dire depuis quand, de peur que je ne l'apprenne par d'autres? et vous devez le comprendre, madame, l'apprendre par d'autres, ce serait terrible pour moi et pour vous.
- Monsieur, fit la comtesse en gardant la même quiétude d'esprit et de visage, je n'aimais plus mon mari avant-hier, et c'est d'hier que j'ai commencé à aimer le roi.
Un éclair de fureur, de désespoir, un éclair de jalousie brilla dans les yeux du comte.
Puis tout à coup il se calma.
- Assurez-moi que vous ne plaisantez pas, reprit-il avec un accent plein de douceur et de mélancolie. J'ai bien besoin de celle parole, Louise. Et il croisa ses bras sur sa poitrine gonflée et pleine de soupirs.
- Monsieur, je vous le déclare le cœur navré: ce n'est point une raillerie à faire, car le chagrin m'est entré dans l'âme avec cet amour.
- Enfin, cet amour que vous osez m'avouer, la honte et le malheur sont au bout! Réfléchissez bien, je vous en prie, madame.
- J'ai réfléchi.
- Mais je vous empêcherai, moi, de courir il votre ruine.
- Je crois, monsieur le comte, que, le faisant, vous me rendriez service. Toutefois - voyez jusqu'où va ma franchise avec vous - toutefois, je n'ose véritablement vous demander de m'y aider.
- Pourquoi?
- Parce que - faut-il vous l'avouer ? - je crois que je maudirais vos bons offices.
Mailly s'arrêta.
- Du marbre! Je me heurte vainement, je cherche vainement une âme! Allons, patience! Je suis né malheureux! Il n'y a peut-être en France que deux femmes comme Mlles de Nesle et de Clèves, et il faut que Louise et Olympe me soient échues toutes deux.
Et le comte, ramené à des idées plus calmes, sinon moins douloureuses, s'inclina devant cette inébranlable volonté de la comtesse, et se contenta de dire:
- Heureusement, madame, que je suis encore votre maître, et que dans la position respective que nous nous sommes faite, un sous-seing privé n'engage à rien aucune des deux parties contractantes.
- Vous vous trompez, monsieur le comte; car, si je suis déterminée à écouter d'autres hommes que vous, ce pacte, qui constate ma liberté, j'en ferai usage. Il est illégal peut-être devant les tribunaux, mais il vous fera perdre tous vos procès devant l'opinion publique, le seul tribunal dont j'aie à redouter quelque chose, Et maintenant, si vous n'avez pas autre chose à me dire ...
Et, avec un geste de reine, elle lui montra la porte. Mailly salua, écrasé, et sortit.


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