Olympe de Clèves Vous êtes ici : Accueil > Accueil > Bibliothèque
Page précédente | Imprimer

Chapitre LVI
M. de Fréjus, précepteur du roi Louis XV

Le cardinal était vieux, mais encore vert. à une affabilité onctueuse et persuasive, il joignait une sorte d'éloquence sacerdotale qui, par moments et pour de certaines affaires, donnait à ces communications la solennité dont le manque absolu de génie l'eût privé dans les grandes occasions.

Il avait le regard calme et inquisiteur du prêtre habitué à chercher plus loin que la pensée, à fouiller la conscience.
Dans ce qu'on lui disait, il n'écoutait guère que ce qu'on ne lui disait pas. Il passait à travers la forme, et rarement manquait de deviner le reste.
M. de Fleury, d'abord abbé, puis évêque de Fréjus, puis cardinal, M. de Fleury, homme médiocre et qui cependant occupa longtemps, absolu dans son apparente humilité, la plus haute position de l'Europe, fit sa politique pendant vingt ans avec la mémoire des traditions du dernier règne. Vous eussiez dit, Louis XIV absent, un intérim du père Letellier.
Richelieu introduit, Fleury débuta par des politesses. I1ambassadeur, comme on le pense bien, ne fut pas en reste avec lui. Avec ce tact parfait qu'il possédait, il avait deviné, rien qu'au salut, rien qu'au regard de M. de Fréjus, qu'il n'avait qu'à se laisser encourager.

Le cardinal le complimenta en homme de goût sur sa négociation près de l'empereur.

- Monseigneur, répondit Richelieu, la tâche était aisée, j'avais vos idées.
- N'importe, répliqua Fleury, il était difficile à un homme aussi jeune que vous êtes de conduire à bien ces têtes allemandes, lourdes dès le berceau.
Richelieu sourit.
-Monseigneur, répondit-il, vous vous trompez aux apparences. Je ne suis plus jeune.
- On le dit, fit M. de Fréjus en souriant à son tour. Est-ce que cela serait vrai, par hasard?
- Oh! d'un mot, monseigneur, vous allez comprendre pourquoi je n'ai plus besoin d'être jeune.
- Dites ce mot, monsieur le duc.
- Je suis devenu ambitieux.
- Bon! cela devait venir un jour ou l'autre au petit-neveu du grand cardinal.
- Eh bien! monseigneur, cela est venu.
- Ferez-vous la guerre ou la diplomatie?
- L'une ou l'autre, au choix de Sa Majesté.
Et, en disant ces mots, le duc s'inclina de manière à prouver à Fleury que, tout en mettant une fausse adresse à la lettre qu'il jetait à la poste, il désirait que cette lettre arrivât à la véritable, Fleury fit un petit salut amical qui signifiait qu'il avait parfaitement compris.
- Vous êtes bien avec le roi, monsieur le duc? demanda-t-il.
Je l'espère, monsieur. J'arrive d'avant-hier, et je n'ai gêné personne depuis deux ans.
- Comment avez-vous trouvé le roi?
- Charmant.
- N'est-ce pas?
- Et des façons toutes royales, en vérité. Seulement...
- Quoi donc? demanda M. de Fréjus.
- Eh bien! le roi s'ennuie.
- Que dites-vous donc là?
Une nouvelle officielle, monseigneur; car c'est le roi en personne qui m'a chargé de vous la communiquer.
- Le roi s'ennuie?
- à mourir.
- Ce n'est pas possible!
- C'est réel, monseigneur.
- Et il vous l'a dit?
- Hier soir, en propres termes.
- Où cela?
_ Au jeu de la reine, où je m'étais rendu, selon mon devoir.
Les sept derniers mots interrompirent sur les lèvres de M. de Fréjus une grimace commencée après les cinq premiers.
- Oh! mais c'est du dernier grave, cela! dit le cardinal, heureux d'avoir été jeté, par cette adresse délicate de Richelieu, en plein courant de conversation. Voyons cela, monsieur le duc, si vous avez un moment à me donner.
- Toute la vie, monsieur.
- Eh bien! profitons-en pour causer.
Il sonna. Barjac entra.
- Barjac, dit M. de Fréjus, faites donc retirer tout le monde; je suis fatigué, et ne verrai plus personne aujourd'hui.
Barjac sourit à Richelieu et sortit.
- Je ne reviens pas de ce que vous venez de me dire! s'écria M. de Fréjus; et, en vérité, si ce n'était pas vous ...
- Vous savez que je ne mens plus.
- Plus ... jamais?
- Plus jamais! monseigneur.
- Oh! duc!
- Sur l'honneur! ... Excepté à Vienne, avec des Espagnols ; encore fut-ce deux ou trois fois seulement.
- Pour le bien du service?
- J'en ai eu l'absolution.
- Homme extraordinaire! vous serez donc toujours le même?
- Oh! non, monseigneur; je vous ai déjà dit que j'étais si fort changé que je ne me reconnaissais plus.
- Je veux dire qu'il faut toujours qu'on s'occupe de vous avant tout le monde.
- Ce n'est pas ma faute, monseigneur.
- Et la faute à qui?
- C'est la faute des gens qui ont la bonté de m'accorder plus de valeur que je n'en ai.
- Bon! voilà que je voulais vous parler uniquement du roi, et que je suis conduit à vous parler uniquement de vous.
- Pauvre sujet, monseigneur!
- Ne riez plus. Vous affirmeriez que vous vous faites donner l'absolution, vous!
- Moi, moi qui suis très religieux, oui, monseigneur.
- Oh! duc, fit le vieillard en branlant la tête, il me semble encore entendre tinter à mes oreilles certains bruits de Vienne qui démentent un peu tous ces miracles de conversion.
- Je sais ce que vous voulez dire, ou je me trompe fort, répliqua Richelieu.
- Oui, certaine scène.
- De magie?
- Précisément.
- Eh bien! monseigneur, faites-moi l'honneur de me dire à moi, pauvre étranger, comment l'on vous a conté la chose ici; ensuite, je vous dirai, moi, la vérité.
- Oh! c'est court. On a dit que vous étiez allé faire avec l'abbé de Sinzendorf des expériences de magie blanche'.
- Où cela, monseigneur?
- Dans un endroit écarté, près de Vienne ... des carrières, je crois ... et que là, le magicien, vous ayant trop ou trop peu fait voir le diable, vous aviez eu avec lui une querelle à la suite de laquelle le pauvre diable - je parle du magicien, entendons-nous - avait été trouvé mort, disons le mot, assassiné.
- Tout cela est l'exacte vérité, monseigneur; seulement, de tout ce récit, retranchons un seul mot...
- Le mot assassiné, n'est-ce pas?
- S'il vous plaît.
- Ainsi, ni vous ni M. de Sinzendorf. ..
- Ni moi, ni M. de Sinzendorf, n'avons assassiné le magicien.
- Il est mort cependant.
- C'est vrai qu'il nous a fait ce méchant tour; mais voici comment la chose est arrivée.
- Voyons!
- M. de Sinzendorf et moi, nous nous sommes fait tirer notre horoscope.
- Vous l'avouez.
- Oui, monseigneur, et le péché est là.
M. de Fleury approuva en théologien par un signe de tête.
- Le sorcier commença par nous raconter quelques vérités et beaucoup de mensonges. Il nous mit au courant de certains secrets de cour ignorés dans la diplomatie.
- Ah! ah! c'était donc un sorcier de bonne maison?
- Ensuite il nous offrit de nous procurer à chacun ce qui nous plairait le plus.
- Vous lui demandâtes, vous, d'être toujours aimé des femmes?
- Mon Dieu! non, monseigneur, car là précisément était la question. J'avais la fatuité de croire cette demande inutile.
- Voyez-vous!
- Je lui demandai la clef du cœur des princes.
- Ah! ah! je vous vois venir, toujours vos idées d'ambition.
- Elles ont germé vers cette époque, monseigneur.
- Eh bien! vous l'a-t-il donnée, cette clef?
- Monseigneur, l'affaire allait se conclure quand un événement inattendu dérangea nos plans. M. de Sinzendorf, lui, peu jaloux de la clef du cœur des princes, attendu qu'il prétendait la posséder, lui demanda la clef du cœur des femmes.
- Le sorcier pouvait vous satisfaire tous les deux sans vous désobliger ni l'un ni l'autre.
- Voici où est le drame, monseigneur. à peine eut-il lâché ces mots imprudents que le sorcier lui répondit que, pour certaines gens, la clef du cœur des femmes était un meuble inutile, attendu que les femmes n'avaient pas de cœur.
- Oh! fit M. de Fleury.
- Il Y avait un peu d'exagération. Aussi, voilà M. de Sinzendorf qui prend la balle au bond et qui déclare calomnieux le propos du sorcier.
- Bah!
- C'est concevable, monseigneur. M. de Sinzendorf avait en ce moment la plus tendre affection pour une dame sur l'amour de laquelle il croyait pouvoir compter.
- Vanitas vanitatum, murmura M. de Fleury.
- Justement, monseigneur, soit que le sorcier connût cette passion, soit qu'il fût réellement sorcier et la devinât: «Monsieur, lui répliqua-t-il, Mme***, que vous aimez, est la plus mauvaise preuve que vous puissiez choisir à l'appui de votre opinion sur les femmes.»
- Oh! fit M. de Fleury, le trait n'était pas émoussé.
- Aussi piqua-t-il M. de Sinzendorf en plein cœur; la colère lui monta aux yeux.
- Ah! drôle! s'écria-t-il, tu mens!
- Monsieur, répondit le sorcier sans se déconcerter, jamais on ne devrait donner de démenti à un homme, encore moins à un sorcier, et surtout on ne devrait jamais injurier celui que l'on est venu déranger pour un besoin quelconque.
- C'était un sorcier bien susceptible.
- C'est justement la réflexion que je me fis, monseigneur. Cette susceptibilité m'étonna. Il me semble deviner sous cette affaire tout autre chose que ce que M. de Sinzendorf croyait y avoir vu lui-¬même. Le lieu était mal choisi, comme vous l'avez dit, monseigneur. Nous nous trouvions au milieu des carrières, à une lieue de Vienne, la nuit, sans lumière, éclairés seulement par une lune plutôt blafarde; ce sorcier avait l'air d'un homme assez familiarisé avec la solitude et tout prêt à en tirer parti. Je fis signe à M. de Sinzendorf de se taire, mais il était lancé. Je ne pus l'arrêter. Il mit le sorcier au défi de lui prouver sur Mme de *** quelque chose qui lui fût désagréable.
- Et que fit alors le sorcier? demanda M. de Fleury.
- Ah! monseigneur, le sorcier était poussé par sa mauvaise étoile. Il parla, il parla près d'une demi-heure, et, pendant cette demi-heure il apprit à M. de Sinzendorf, qui tantôt se crispait, tantôt rougissait et tantôt pâlissait, il lui apprit des choses qui me firent rire, tressaillir et trembler tout à la fois.
- Quel homme était-ce donc là?
- C'était un malheureux homme, monsieur; il poussa M. de Sinzendorf à bout, et celui-ci le voulut châtier; ce que voyant, le sorcier maudit tira du milieu des pierres une courte mais solide épée, qu'il y avait cachée, et reçut M. de Sinzendorf si rudement que la partie menaçait de se changer en catastrophe pour mon compagnon.
- Et quel homme était-ce que l'abbé? demanda M. de Fleury.
- L'abbé était un homme bien élevé, bien dressé, mais il avait affaire à forte partie. Il fut chargé par le sorcier avec une telle vigueur que, de simple spectateur que j'étais, je crus qu'il était temps de me faire acteur. Il s'agissait de sauver M. de Sinzendorf ; un faux pas l'eût perdu; il était tout hors de mesure. Il glissa en arrière et se renversa; le sorcier fondit sur lui pour l'achever.
- Mais c'était donc le diable que cet homme!
- Le diable en personne, monseigneur; je l'ai toujours pensé, et la preuve ...
M. de Richelieu s'arrêta.
- Ah ! vous avez une preuve?
- Oui, monseigneur, c'est qu'il reçut de moi un coup d'épée qui entra au-dessous du téton droit et sortit au-dessous de l'épaule gauche, et que ni d'une blessure ni de l'autre il ne suinta même une goutte de sang.
- Eh bien! mais vous voyez qu'il reçut de vous un coup d'épée, duc.
- Oui, monseigneur, et deux de M. de Sinzendorf, que le secours que je lui avais porté remit à l'aise. Nous étions en cas de légitime défense, monseigneur, et ma conscience ne me reproche rien.
- Enfin, vous avez tué le diable, voilà ce que je vois de plus clair dans tout cela.
- Monseigneur connaît le proverbe: Mieux vaut tuer le diable que le diable ...
- Ne nous tue. Pauvre sorcier! quel dommage qu'il ait eu affaire à deux fous comme vous! Si j'eusse été là, à votre place, le sorcier ne m'eût point offensé, je n'eusse point offensé le sorcier; j'aurais su tout ce que vous savez, et beaucoup d'autres choses encore avec; voilà le fruit de la patience.
- Oh! monseigneur, quoique nous ayons été un peu vifs, j'en conviens, le pauvre diable avait eu le temps de nous apprendre une foule de bonnes choses.
- Je vous crois; mais revenons, je vous prie, à votre conversion.
- Elle date justement de là, monseigneur. Coupable d'avoir presque tué un homme pour des raisons peu justificatives, j'ai rompu avec la curiosité, j'ai rompu avec les femmes, j'ai rompu avec la colère, qui sont les trois grandes pierres d'achoppement dans la vie.
- Enfin, que vous a dit le sorcier?
- Eh bien! monseigneur, il m'a positivement indiqué le moyen de
plaire toujours aux rois.
- Et a-t-il exigé de vous le secret?
- Monseigneur, je ne vous apprendrais rien à vous, que le roi idolâtre; laissez-moi donc garder un peu pour moi-même les avantages que je récolte chemin faisant.
- Puisque vous êtes si discret, usez seul de vos moyens; mais usez en vite, monsieur le duc; le roi s'ennuie, disiez-vous: plaisez-lui en l'amusant.
- C'est précisément ce à quoi je vise, monseigneur; c'est aussi la raison de ma visite à Issy.
- à Issy, monsieur le duc, s'écria le cardinal, qui crut que Richelieu se livrait trop tôt et qui voulait distiller plus longuement sa diplomatie. Vous dites que vous êtes venu à Issy pour distraire le roi? Eh! monsieur le duc, qu'y trouveriez-vous, sinon des ennuis bien autrement grands que les siens à reporter au roi?
- Mais, monseigneur, dit le duc, vous ne m'avez pas compris. Je n'ai jamais prétendu troubler, par des idées mondaines, la solitude si pieuse dans laquelle vous vivez, à Dieu ne plaise! et puis, ce ne sont point là mes idées.
Le cardinal leva son œil observateur sur le duc, comme pour lui demander quelles sortes d'idées il pouvait avoir, s'il n'avait pas celles qu'on désirait qu'il eût. Mais le duc s'était fait un rôle.
- Monseigneur, répondit-il, j'ai bien réfléchi depuis que j'ai vu le roi si triste, et je me suis occupé à lui trouver des divertissements au sujet desquels je viens vous demander conseil.
- Ah! voilà parler! s'écria Fleury. Dites, monsieur le duc, dites, vous êtes un homme de bon conseil, et, en matière de divertissement, je pense que vous devez être de première force. Le roi ne s'est pas mal adressé en s'adressant à vous.
Richelieu sourit modestement, comme un prédicateur qu'on loue avant le sermon.
- Monseigneur, dit-il, j'ai une connaissance assez approfondie des sentiments que les rois de l'Europe ont conçus pour notre jeune roi. Ce n'est pas de l'amitié seulement, c'est comme une paternité avec quelque chose de plus tendre. C'est comme qui dirait un amour et une curiosité tout ensemble.
- Où veut-il en venir? se demandait le cardinal accoudé sur table et dévorant chaque intention de l'orateur.
- Vous aurez appris, continua Richelieu, que Sa Majesté est appelée partout l'Enfant de l'Europe?
- On me l'a dit, répliqua Fleury; mais je ne vois pas trop ...
- Où je vais; m'y voici, monseigneur. Avec un logicien de votre force, je n'ai pas cru devoir négliger la précaution de l'exorde; j'avais à vous proposer de faire voyager le roi pour le distraire.
- Voyager! s'écria Fleury.
- Réceptions, force feux de joie, acclamations des peuples, repas, cavalcades, traversées maritimes, seront un divertissement que l'on peut faire durer six mois, si on le veut bien.
- Faire voyager le roi six mois! répéta Fleury tout ébahi; mais vous n'y pensez pas, monsieur le duc! Il n'est pas probable que vous me disiez sérieusement de me séparer six mois du roi!
- Vous ne vous sépareriez pas du roi, monseigneur, puisque vous l'accompagneriez.
- Moi, accompagner le roi! continua Fleury en se démenant sur son fauteuil. Moi, vivre dans ce bruit continuel ! Moi, faire mille lieues! Ah! monsieur le duc, est-ce bien sérieusement que vous avez parlé?
- Du plus sérieux de ma raison, monseigneur.
- Pour distraire le roi, le tuer! me tuer aussi!
- Eh! monseigneur, on voyage si commodément aujourd'hui! et puis, quelle arche d'alliance! C'est un pont jeté de la France à tous les royaumes divisés de nous par la guerre.
Le cardinal secoua la tête avec le désespoir que les meilleurs diplo¬mates ne peuvent dissimuler quand leur dupe, au lieu de donner dans le panneau, s'esquive et les force à de nouvelles combinaisons. Richelieu, désappointé en apparence par le peu de succès de son ouverture, jouissait intérieurement de la cruelle déception du vieillard.
- Votre idée, monsieur le duc, est peut-être excellente, répondit Fleury; mais, par malheur, elle est impraticable.
- Renonçons à distraire le roi, dit Richelieu en composant un énorme soupir.
- Vous n'avez pas trouvé autre chose, vous si inventif? demanda le cardinal.
- Hélas, non, monseigneur.
- Enfin, permettez-moi de vous dire que quand, à l'âge du roi, M. votre père vous força de voyager avec votre précepteur, vous ne trouviez pas la chose trop divertissante, je suppose.
- Oh! s'écria Richelieu, non certes, monseigneur; mais entre moi et le roi, quelle différence! j'étais né avec tous les défauts, j'avais acquis tous les vices. Le roi, au contraire, est d'une piété, d'une solidité de principes, d'une fidélité qui me surprennent.
- C'est vrai, dit Fleury.
- Moi, j'étais perverti, poursuivit Richelieu; le roi est un saint.
Instruire un gentilhomme, c'est l'améliorer; instruire un roi, c'est le gâter.
- Vrai! vrai! et bien dit! s'écria Fleury entraîné par cette maxime qu'il avait si souvent exposée comme programme; mais enfin, parce qu'un roi est roi, faut-il qu'il meure d'ennui?
- Monseigneur, c'est dans les attributions de la royauté, l'ennui.
- Oh! duc! duc!
- Alors, monseigneur, que le roi fasse ses affaires lui-même, qu'il écrive avec ses ministres, qu'il veille aux finances, qu'il. .. qu'il fasse la guerre, il ne s'ennuiera pas.
- Voilà, duc, que vous passez aux extrémités, fit le cardinal épou¬vanté. Distraire le roi en mettant le feu à l'Europe! Et vous dites que vous êtes devenu sage?
- Je ne sais alors, dit béatement Richelieu; mais je vous avoue qu'après vous avoir proposé le voyage, le travail, la guerre ...
- Cherchons encore s'il n'y aurait pas autre chose.
- De grand cœur.
- Voyons maintenant dans les amusements nobles.
- Il Y a la culture des fleurs, dit Richelieu; mais le roi s'est blasé sur les légumes.
Le cardinal rougit légèrement; le duc parlait de trop bonne foi pour qu'on pût se fâcher.
- Il y a encore le jeu, continua Richelieu.
- Ce n'est pas un amusement de saint homme, duc, et surtout ce n'est pas un amusement de roi. Quand le roi joue et qu'il gagne, les seigneurs perdent; quand le roi joue et qu'il perd, le peuple paie.
- La chasse.
- Oh! le roi chasse trop déjà.
- Savez-vous, monseigneur, que c'est embarrassant: pas de guerre, pas de voyage, pas de travail, pas de jeu. Ah! j'oubliais une chose qui a tant diverti Louis XIV, et qui n'est même pas soupçonnée de son petit-fils.
- Quoi donc?
- Les bâtiments, monseigneur.
- Le roi n'y pense absolument point, duc.
- Sa majesté, à dix-huit ans, n'est même plus amusable! Comment faire? Ce malheur n'était arrivé à son aïeul qu'à soixante ans. Et Richelieu se tut.
Fleury, après quelques minutes d'observation, hasarda timidement quelques paroles.
- Je suis, dit-il, le plus mauvais conseiller que ce pauvre prince puisse avoir. Prêtre et vieux, je n'ai pas le droit de lui inspirer l'amour du péché.
- Pas même le péché de l'amour, dit en riant Richelieu avec une hardiesse de génie.
Fleury le regarda fixement et fut tout déconcerté de son aplomb.
- Affreux péché! dit-il à demi-voix.
- Qui n'est pas à craindre pour Louis XV, ajouta Richelieu. L'amour du roi, c'est sa femme. Fleury se tut à son tour.
- Et au fait, reprit le duc, comment se fait-il que le roi étant amoureux s'ennuie? C'est un problème, cela. Le roi est fou de la reine, et il s'ennuie! le roi est un mari infatigable et il s'ennuie! Voilà qui ne se comprend pas! Vous, monseigneur, qui savez tous les secrets du roi. ..
Le cardinal soupira bruyamment.
- Qu'y a-t-il? demanda Richelieu. Fleury soupira encore.
- Mon Dieu! monseigneur, vous m'effrayez; est-ce que le roi et la reine ...
- Ah! duc!
- Quoi! cet apparent amour! Oh! ce n'est pas possible! Hier encore, le roi regardait sa femme avec des yeux de diamant.
- Duc, je ne sais pas si le sorcier de Vienne vous a dit tous les secrets, mais cela ne paraît pas être.
- Je tombe de mon haut, monseigneur.
- écoutez, duc; le roi est excusable jusqu'à un certain point. Il est né avec un tempérament des plus exigeants, une complexion ardente: il est le vrai fils de son grand-père.
- Et la reine est une sévère Allemande, n'est-ce pas?
- Hélas! vous voyez là tout mon désespoir!
- Mon Dieu! monseigneur, mais il faut sauver ce ménage-là. C'est le repos du monde, outre le bonheur de nos maîtres, que nous aurons assuré.
- Oui, duc, oui, il faut absolument sauver ce ménage-là, car si une fois le roi s'ennuie, où peut-il aller pour se distraire? C'est effrayant! - Vous dites, monseigneur, que le roi est doué d'une complexion énergique et ardente.
- Du feu, monsieur le duc.
- J'ai toujours ouï dire que les tempéraments de cette nature avaient besoin d'être domptés ou affaiblis. Domptés, c'est souvent impos¬sible; affaiblis, c'est plutôt faisable. Est-ce que l'on n'emploie pas certaines pratiques atténuantes, particulièrement dans les ordres religieux?
- Minuantes, voulez-vous dire, monsieur le duc; minuantes, venu du mot latin diminuer. Nous appelons cela dans les cloîtres des minu¬tions, et les Chartreux particulièrement y sont assujettis une fois l'an.
- Eh! monseigneur, on pourrait voir ... De violents exercices, la paume, la natation, un régime sévère.
- Monsieur le duc, nous avons dit, ne l'oublions pas, que le roi s'ennuie et que nous voulons le distraire.
- Il Y a, monseigneur, nécessité de donner des sujets de distraction au roi.
- Je le sais bien, monsieur le duc.
- C'est vrai, tout cela ne l'amuserait pas. Les minutions sont des remèdes et non des amusements; laissons là les minutions.
- J'ai un scrupule, monsieur le duc; vous l'allez apprécier en bon gentilhomme: la personne du roi est sacrée, n'est-ce pas?
- Inviolable.
- Il me semble alors que ce serait porter atteinte à cette inviolabilité que de saigner le roi, que de le priver de nourriture. Le moyen est. ..
- Monacal et chirurgical, c'est vrai; mieux vaudrait un moyen ministériel.
- Vous ne le pratiquerez pas, monsieur le duc.
- J'aimerais mieux, je l'avoue, donner tout mon sang au roi et mourir de faim pour qu'il mangeât selon son appétit et fit selon son tempérament.
- Vous voyez bien, duc, l'embarras recommence. Richelieu encore une fois se tut.
- Tout à l'heure, dit Fleury, une idée m'était venue à propos de ce scrupule: qui dit scrupule dit aussi cas de conscience. En voici un qui se présente à mon esprit.
- Je suis ici pour vous écouter, monseigneur, et je vous écoute de toutes mes oreilles.
- Admettons que le roi, qui est le maître, car enfin il est le maître; admettons, dis-je, qu'il fasse ce qu'il veut...
- Il faut bien l'admettre.
- Qu'il est de notre devoir, à nous ...
- De nous incliner, monseigneur.
- S'il fait mal?
- De le plaindre, alors, et de ne pas l'imiter, dit dévotement
Richelieu.
- Parfait, duc. écoutez mon cas de conscience. Si vous saviez, par exemple, qu'à la chasse le roi est emporté par son cheval qui va le précipiter dans un fossé de vingt pieds; si, sur le passage du roi, pour aller au fossé, se trouvait un petit fossé de trois ou quatre pieds au plus' ...
- Monseigneur, je couperais le jarret au cheval pour qu'il jetât le roi dans le plus petit fossé.
- N'est-il pas vrai? Suivez bien, monsieur le duc, suivez bien, je vous prie, mon raisonnement. Pour peu que les feux de sa nature l'entraînent vers l'abîme du péché, qui sait si, dans ses erreurs, il ne compromettra pas et l'honneur de son nom et le salut de l'état?
- Parfaitement raisonné, monseigneur.
- Que faire alors? Ne pourrait-on pas se permettre de choisir pour le roi le fossé dans lequel il glisserait avec moins de risques de son honneur et de celui de l'état?
Richelieu feignit de s'arrêter sur cette idée, comme s'il ne l'eût pas parfaitement comprise.
- Je m'explique, poursuivit Fleury assez contrarié d'être obligé d'en¬trer dans des détails qu'il se serait volontiers abstenu de donner, je m'explique le penchant naturel du roi pour certains plaisirs. Le roi s'y précipitera en aveugle: vous connaissez presque aussi bien que moi Sa Majesté, et vous n'élevez pas le moindre doute à ce sujet; le roi, dis-je, s'y précipitera; ne devons-nous pas, n'est-ce pas une mis¬sion sacrée pour nous, que de diriger ce penchant?
- Très bien! très bien! je commence à comprendre, monseigneur, s'écria Richelieu.
- Comment le faire alors, reprit le ministre, sinon en paraissant l'autoriser?
à peine le cardinal eut-il lâché cette parole imprudente, que Richelieu, qui l'attendait depuis plus d'une demi-heure, sauta dessus comme l'épervier sur la perdrix qu'il fatigue de ses cercles dans une chasse.
- Autoriser, autoriser les désordres du roi! s'écria-t-il en bondissant. Oh! monseigneur, quelle parole venez-vous de prononcer!
- Non, non, je ne parle pas de cela, duc. Mon Dieu! non, je ne parle pas de cela! Qui vous parle de désordres, d'abord?
- Cela m'étonnait, monseigneur; car, enfin, cette vertu du roi, c'est à vous seul qu'il la doit, puisque son tempérament y est tellement opposé.
- Sans doute, sans doute! en attendant, il est sur le point de la perdre.
- Vous croyez?
- Tout le confirme. Il s'éloigne peu à peu de la reine.
- Oh! non, impossible, monseigneur! On dit la reine dans une situation ...
- Cela ne prouve absolument rien, dit le cardinal un peu moins chastement que n'eût dû faire un évêque de Fréjus, un peu moins lestement que ne l'eût fait le cardinal Dubois, archevêque de Cambrai et successeur de Fénelon. La reine peut donner un dauphin à la France, et pour cela ne pas être la maîtresse de son mari. En un mot, je pense qu'il reste au roi tant d'heures à dépenser qu'il a le temps de se perdre en perdant son ménage, comme nous le disions tous deux si bien tout à l'heure. J'en reviens à mon opinion. Il ne s'agit pas du bien ou du mal, mais du plus ou moins de mal; il ne s'agit pas de garder le roi vertueux, puisqu'il a la ferme volonté de cesser bientôt de l'être, mais de le garder le moins pécheur qu' l'on pourra.
Richelieu leva les yeux au ciel.
- Vous figurez-vous, duc, le moment où nous apprendrons que cette pauvre reine est délaissée, le moment où le roi affichera des amours publiques?
- Impossible! impossible! monseigneur, avec les principes qu'il il reçus de Votre éminence.
- Eh! duc, le danger est partout; il nous environne. Il est dans Mme de Charolais, qui glisse elle-même des vers dans la poche du roi; dans Mme de Toulouse, qui laisse le roi l'admirer à Rambouillet; dans toutes les femmes enfin, qui semblent dire au roi quand il passe: «Regardez donc, sire, vos sujettes sont à vous comme vos sujets.»
- Il finira par succomber, hélas! monseigneur, malgré tout ce que vous aurez fait et malgré tout ce que je suis prêt à faire.
- Quelle affreuse responsabilité pour nous, monsieur le duc, qui avons vu naître ce penchant, qui l'aurons complaisamment souffert, qui n'aurons pas su le modérer, qui serons dévorés par lui.
- Que faire? que faire?
- Conscience faible! conscience timorée! s'écria le cardinal. Oh! que vous êtes flottants et tièdes pour le bien, vous autres gens d'épée! comme vous savez peu trancher dans la partie malade pour sauver la partie saine! Nous autres pauvres gens d'église, côtoyant toutes les passions sans oser les regarder, nous tremblons devant l'opinion qui nous veut sains et sanctifiants, comme si nous n'étions pas des hommes. Nous n'avons qu'une seule ressource, les conseils; qu'une faculté libre, la vue; et quand nous appelons à l'aide ces hommes d'action, ils désertent, en faisant plus de morale subversive que nous n'osons faire de mal réparateur.
- Mais, monsieur le cardinal, s'écria Richelieu, je suis tout prêt à vous aider, je ne suis venu que pour cela. Seulement, vous n'atten¬diez sans doute pas de moi les lumières, l'expérience d'un génie tel que vous. Il a fallu soixante-dix hivers, monsieur le cardinal, pour mûrir cette patriarcale raison qui fera de vous quelque jour l'arbitre tout-puissant des destins de l'Europe. Je suis un jeune homme, moi; je n'ai que de bonnes intentions, peu d'initiative pour le bien, restant de mes mauvaises habitudes. Je me suis corrigé du mal en le fuyant, et je le vois partout. Je suis un esprit incomplet qui ne sait pas encore voir la guérison du poison dans les poisons eux-mêmes. Instruisez-moi, éclairez-moi, employez-moi, je suis prêt à vous ser¬vir fidèlement, voilà tout.
- Convenez donc d'une chose, duc, dit le cardinal d'un ton plus doux, c'est que rien ne modérera les furieux désirs du roi si ce n'est l'apparence d'une satisfaction.
- C'est vrai; et encore l'apparence, monseigneur!
- Convenez que je ne me sens pas assez mondain, moi, pour arborer ces théories; je vous en charge. Convenez que le mari qui a quelque peccadille à se reprocher n'est que plus empressé à aimer sa femme.
- On le dit, et je le crois, monseigneur. Voilà l'effet que cela me pro¬duirait, à moi, si j'avais une femme.
- Comment! si vous aviez une femme. On dirait, en vérité, monsieur le duc, que vous oubliez que vous êtes marié.
- Oh! je le suis si peu, monseigneur.
- Mais ce n'est pas de vous qu'il s'agit.
- Mais il s'agit du roi.
- Eh bien! que le roi ait une maîtresse, et le voilà au mieux avec la reine, d'après votre propre système.
- Exposé par vous, monseigneur.
- Je disais donc: eh bien! que le roi ait une maîtresse.
- Oui; mais une maîtresse, c'est le scandale! s'écria Richelieu; et puis vous comptez sans la jalousie, qui abrégerait les jours de cette pauvre princesse de Pologne!
- Croyez-vous donc impossible, duc, que le roi se livre à des passe-¬temps ignorés du public?
- C'est difficile.
- Duc, la reine elle-même comprendrait, on lui ferait comprendre que c'est le seul moyen de le sauver. Faut-il que je vous dise tout? Eh bien! je crois que la reine en serait contente.
- Oh! monseigneur, oh!
- J'ai mes raisons pour le croire. La reine est la créature la plus immatérielle qui soit. Demandez à son médecin, à Maréchal.
- Tout s'arrangerait, alors.
- Et l'on aurait conquis une tranquillité absolue pour quelque temps.
- Réfléchissons-y, monseigneur; cela en vaut la peine.
- Oh! oui, duc, oh! oui.
_
Votre éminence a déjà entrevu un coin de cet avenir?
- Non, je l'avoue.
- Mais enfin le roi ne jetterait pas les yeux sur la première venue?
- Duc, je suis novice en la matière; si j'avais l'honneur de m'appeler Richelieu, je n'adresserais point de ces questions à un pauvre prêtre.
- écoutez donc, monseigneur, je recule aussi devant la responsabilité, moi.
- Le meilleur moyen, duc, c'est de préparer les sujets. Chaque fois que, dans vos ambassades, vous avez pris des agents, étiez-vous responsable?
- Mais oui, monseigneur.
- Eh bien! duc, comment faisiez-vous pour n'avoir pas de désagréments?
- Je choisissais les agents.
- Voilà! Maintenant je n'ai plus rien à vous dire. Faites-vous l'ami du roi, ou consentez à laisser prendre chez Louis XV cette place qui va m'échapper. Prenez garde qu'elle n'aille échoir à quelqu'un de nos ennemis. Figurez-vous ce qui résulterait d'une combinaison ayant à sa tête, soit les légitimés du feu roi, soit des étrangers comme les Espagnols! Méfiez-vous de l'influence du Nord; le roi Stanislas pousse la reine sa fille à la politique. Je ne vous en dis pas davantage, car, si je ne me trompe, vous n'êtes pas du dernier bien avec la reine.
- Tout ce que dit Votre éminence est marqué au coin du plus parfait génie, monseigneur. Ainsi, au cas où vous entendriez parler des dis¬tractions du roi, vous ne me poursuivriez pas d'un mauvais sentiment.
- Nullement, vous auriez agi pour le bien de l'état.
- Au cas où vous deviendriez premier ministre, soit par le dépit de M. le duc, soit par l'influence que prendrait sur le roi une nouvelle idée, je puis être assuré que vous ne me seriez pas disgracieux?
- Si jamais, ce que je ne crois pas, parce que je ne le désire point, je devenais premier ministre, comme vous dites, M. le duc, me trouvant libre envers tout le monde, me trouvant à l'abri de la politique de la reine, je m'empresserais de vous témoigner ma reconnaissance.
- Il faut s'attendre à tout, monseigneur; le roi est en ce moment sous la pression de M. le duc. Cette combinaison, que nous avons trouvée, vous et moi, dégage le roi et précipite peut-être M.le duc; de là, pour moi, une puissante inimitié ...
- Monsieur le duc, il n'est pas d'inimitié contre un homme tel que vous, quand, à l'appui de ses dignités de naissance, il voit arriver les dignités fondamentales de l'état. «Rendez-moi un service aujour¬d'hui, dit le proverbe italien, je vous rendrai trois services demain.» - Dès que je rends service à Votre éminence, je suis trop payé, se hâta de dire le rusé courtisan.
Le cardinal rougit encore une fois et se leva. Richelieu avait déjà préparé sa sortie.
- Monseigneur, dit-il, les temps sont durs et le roi est froid pour les bienfaits. Me promettez-vous de lui demander pour moi, quand j'au¬rai envie de quelque chose?
- Vous ferez le marché vous-même, duc.
En même temps, le cardinal tendit la main à M. de Richelieu.
- Il tombera ou tombera Mme de Prie, pensa le duc; c'est leur affaire.
- Un mot encore, fit le cardinal retenant Richelieu: je compte sur votre exquise sensibilité, sur votre goût parfait, pour bien entourer le roi.
- Ne dites pas ce mot, monseigneur; j'ai reçu l'honneur de votre confidence, cela me suffit. à partir de ce moment, étendez la main dans une direction quelconque, vous me verrez marcher dans cette direction.
- Monsieur le duc, vous me comblez, répliqua le prélat en reconduisant Richelieu avec plus d'affectuosité que de cérémonial. Barjac attendait le duc avec des yeux brillants de joie. On pouvait être sûr que, en sa qualité de valet de chambre, il avait su écouter aux portes.
- Eh bien! dit-il, monseigneur, êtes-vous content?
- Ce n'est pas à moi qu'il faut faire cette question, Barjac, répliqua le duc; c'est à votre maître.
Et, avec un rire significatif, ces deux diplomates se séparèrent.
- Réellement, dit Richelieu, remonté dans son carrosse, celui-ci me paiera mieux et j'aurai eu moins de peine.
Puis réfléchissant:
- Il n'y a plus qu'une difficulté, dit-il. La question de droit est admise, reste la question de fait. Nous causerons de cela, Bachelier et moi.

Chapitre précédent | Chapitre suivant

© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
Haut de page
Page précédente