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Titre Herminie

Année de publication publié pour la première fois en 1845 sous le titre Une amazone, puis en 1858 sous le titre Herminie in Herminie et Marianna en Belgique.

Genre nouvelle

Collaborateur(s) -

Epoque du récit vers 1845

Résumé Edouard est un jeune Parisien oisif, bon, brave et quelque peu mélancolique qui partage sa vie entre sa nouvelle maîtresse Marie, aimée à la légère, ses amis qu'il retrouve chez celle-ci   pour des parties de cartes, et des cours de droit qu'il ne suit que de loin.

Cette vie de plaisirs et de superficialité va être ébranlée par la rencontre d'une mystérieuse femme, Herminie, lors d'un bal à l'Opéra. Elle lui avoue un amour passionné et sa furieuse singularité : son amour est absolu mais peut cesser du jour au lendemain et se changer en une haine mortelle si Edouard révèle quoi que soit à leur sujet. Troublé par cette femme téméraire et peu commune, Edouard se laisse entraîner dans cette passion sans aimer la jeune femme, bien que l'aventure soit périlleuse : pour rejoindre Herminie et le plaisir, il lui faut, la nuit, jeter une planche entre leur deux fenêtres, à hauteur de quatre étages.

Mais cette femme, toute absorbée par sa propre passion et ne faisant montre d'aucun autre sentiment, ennuie bien vite Edouard, pourtant envoûté par la volupté au départ. Il cherche alors à rompre cet engagement. Lors d'un bal où il doit rejoindre Herminie, il raconte toute son histoire à un de ses amis, Edmond, qui la révèle par la suite à Marie, qu'Edouard avait soudainement quittée pour Herminie. Croisant celle-ci au bal, Marie ne peut s'empêcher de lui lancer une allusion à sa relation avec Edouard.

Piquée dans son orgueil, Herminie convie Edouard le lendemain soir dans sa chambre. Mais celui-ci est parti pour l'Egypte et c'est Edmond, désireux de connaître Herminie, qui est sur la planche car son ami lui a confié l'appartement. La jeune femme d'une main sûre retire la planche afin de se venger de la trahison de celui qu'elle aimait et qu'elle croit être à sa merci. A son retour d'Egypte, Edouard apprend la chute mortelle de son ami et la démolition de la maison d'Herminie, envolée pour l'Italie.

Analyse Précédé d'une courte préface où Dumas déplore l'incrédulité des lecteurs face à la vérité exposée dans les romans, afin d'éveiller curiosité et trouble chez ceux-ci, Herminie est une nouvelle fulgurante et en cela envoûtante, bien que peu connue parmi les oeuvres de Dumas.

Herminie apparaît comme un éclair de passion absolue et romanesque où l'amour fou côtoie le crime, éclair dans un monde désabusé représenté par un Edouard peu sensible à ce caractère flamboyant. Dumas semble mettre à distance ces codes de l'amour fou et déploie une ironie amusée qui montre leur la désuétude, au sein même du caractère d'Herminie : sa passion n'est en fait qu'une distraction.  

Cependant, le personnage d'Herminie «fonctionne» encore. Sa fugacité, sa folie amoureuse la font mystérieuse et séduisent un lecteur partagé entre incrédulité et adhésion. Symbole d'une sexualité libre et affirmée, mais aussi d'un érotisme où rôde la mort, Herminie pourrait être l'ébauche des Diaboliques aurevilliennes : disposant des hommes comme Alberte dans Le rideau cramoisi, affranchie et masculine comme Hauteclaire du Bonheur dans le crime.

Et c'est alors tout le problème des sexes et du désir qui se pose. La femme affirmant son désir doit revêtir des traits masculins et perd de sa féminité conventionnelle : elle n'est pas «douce et craintive» mais puissante et dominatrice. Tout comme elle ne peut aimer Edouard que comme un amant et non comme un mari, elle ne peut être aimée que comme une maîtresse, voire une prostituée, et non comme une épouse. C'est un rapport animal qui lie Herminie et Edouard, un attachement déraisonné mais terriblement attirant.

A la fois indomptable et passionnée, mais avec cette conscience aiguë de la distraction et de la légèreté, Herminie incarne, dans ses contradictions et sa suprême désinvolture, l'écriture de Dumas : dernières palpitations du Romantisme et ironie se rejoignent sous les traits d'une femme fascinante et séductrice.

Herminie est une nouvelle où, dans la superficialité d'une vie convenue, palpitent des pulsions irrésistibles de vie, de mort et de folie, sources même de l'imaginaire et de la création littéraire.

Audrey Gilles
© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
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