Titre
Gabriel Lambert
Année de publication
1843
Genre
Roman
Collaborateur(s)
-
Epoque du récit
Prologue en 1835, intrigue principale en 1831, épilogue en 1842
Résumé
Séjournant à Toulon en 1835, l'auteur croise un forçat
dont le visage lui est familier. La véritable identité de
cet homme, Gabriel Lambert, lui est inconnue. Et pourtant, lorsque celui-ci
se présente sous un autre nom, celui du vicomte Henri de Faverne,
ses souvenirs lui reviennent: il fut naguère le témoin d'un
duel opposant le dit vicomte à l'un de ses amis ayant mis en cause
sa prétendue noblesse. De retour à paris, Dumas retrouve
le docteur Fabien qui soigna Faverne à l'issue du duel où
il fut blessé et retranscrit alors le journal de ce dernier.
Le médecin, qui soigne son patient, devine peu à peu qu'un
lourd secret pèse sur la conscience de ce dernier et qu'il n'est
sans doute pas celui qu'il prétend être. Il apprend ainsi
que le jeune homme a eu un enfant d'une brève liaison avec une
jeune paysanne, Marie, et qu'il a abandonné celle-ci dans l'espoir
de conclure une riche union.
Marie, ayant retrouvé celui qu'elle aime, tente de le rejoindre
à Paris mais, rejetée, elle confie au docteur, que le vicomte
de Faverne n'est autre que Gabriel Lambert, paysan de son état,
lâche et paresseux, qui a choisi la facilité pour devenir
riche. Jouissant d'un don fantastique de copiste, le jeune homme est devenu
faussaire et faux monnayeur.
Arrêté, condamné à mort, Gabriel, terrifié
à l'idée de mourir, supplie le docteur d'obtenir sa grâce.
Il voit sa peine commuée en détention à perpétuité
et est envoyé au bagne de Toulon. Ne pouvant supporter ses conditions
de détention, il songe alors au suicide mais demeure lâche
devant la mort: il faudra l'intervention de son compagnon de chaîne,
Rossignol, qui l'aide à se pendre.
Analyse
Bref roman méconnu, Gabriel Lambert
pourrait au premier abord passer pour une simple illustration de l'adage:
«l'habit ne fait pas le moine». En effet, personnage veule,
lâche et trop doué, Gabriel, malgré toutes ses prétentions,
ne parviendra jamais à faire croire à sa noblesse, trahi
encore davantage par sa façon d'être que par les preuves
tangibles de ses modestes origines. Le roman s'impose ainsi comme un questionnement
sur la noblesse: peut-elle s'acquérir ou est-elle innée
en chaque individu? Gabriel, qui veut se faire passer pour noble, est
lâche jusqu'à son pseudo-suicide, raté, dont personne
n'est dupe.
Toutefois, Dumas dépasse largement cette question pour en poser
d'autres, plus cruciales: celle de la condition des prisonniers et celle
de la peine de mort. Une vie infâme (la bagne ou le déshonneur)
vaut-elle mieux que la mort? Rien n'est moins sûr dans ce roman
où la honte et les remords rongent le menteur. Il est aussi question
de justice: Gabriel est puni et choisit lui-même cette punition
en refusant l'échafaud.
Pour mieux souligner l'importance de ces questions, Dumas les inscrit
dans un profond souci de vraisemblance. Outre le recours à des
personnages contemporains de l'auteur (quelle meilleure caution que la
présence dans le récit du roi Charles X?), il utilise le
procédé consistant à déléguer plusieurs
fois la parole à des narrateurs secondaires. Le docteur Fabien,
d'abord, prend en charge le récit (après tout, un médecin
ne saurait mentir...) avant de céder la place à Marie. Enfin,
c'est Rossignol, le compagnon de chaîne, qui apporte une note d'humour
à un récit grave, où l'auteur se montre bien souvent
acerbe et ironique.
Gaële Vaillard
|