Titre
Les deux reines
Année de publication
1864
Genre
Roman
Collaborateur(s)
Comtesse Dash
Epoque du récit
1681-1700
Résumé
Ce livre est la suite des Mémoires de la dame de volupté.
Après sa fuite d'Italie, celle-ci a été remplacée
dans le cur de Victor Amédée II par la comtesse de
Saint Sébastien. Cette femme ambitieuse réussit, par sa
force de persuasion, à le faire abdiquer, à l'épouser
puis à le pousser à tenter de reprendre le pouvoir. Ce qui
vaut au roi de Sardaigne l'humiliation de se retrouver prisonnier et de
mourir dans la solitude.
C'est
ensuite à la cour d'Espagne que nous transporte la suite et la
fin des mémoires de madame de Luynes. Mademoiselle d'Orléans,
nièce de Louis XIV, se voit mariée à l'age de 17
ans au roi d'Espagne Charles II. Quitter la France lui est un véritable
déchirement. L'hostilité des Espagnols à l'égard
des Français, l'austérité de la cour, le pouvoir
de l'inquisition sont causes de sa grande tristesse, que ne peuvent compenser
ni l'amour passionné de son époux, ni le pouvoir qu'elle
a sur lui.
Aussi, quand la comtesse de Soissons, une compatriote, apparaît
à Madrid, la reine malgré sa méfiance naturelle,
ne peut s'empêcher de l'accueillir dans son intimité. Nous
sommes alors en 1688, et la question de la descendance de Charles II commence
à être la préoccupation principale des royaumes d'Europe.
Les menaces de mort ne suffisant pas à amener la reine au parti
de l'Autriche, la comtesse de Soissons l'empoisonne, provoquant ainsi
sa mort.
Bien qu'inconsolable, Charles doit se remarier au nom de la raison d'Etat.
C'est Anne de Neubourg qui sera la deuxième reine d'Espagne. Arrivant
elle aussi en pleurant, elle va cependant aimer d'un amour véritable
ce pauvre roi dont la souffrance physique et morale fait chanceler bien
souvent la raison, déjouant ainsi les intrigues des Autrichiens
qui voulaient qu'elle ait un héritier (quel que soit le père)
pour régler ce problème de succession.
Mais Charles II, en raison d'une maladresse de Louis XIV, prend d'abord
parti pour l'Autriche avant de changer en faveur de la France à
la suite d'une intervention surnaturelle. Il mourra peu de temps après
avoir fait son testament.
Analyse
Les sept premiers chapitres de ce livre sont la suite directe de La
dame de volupté, puisqu'ils nous présentent la
fin du règne de Victor Amédée II. Cette partie du
texte avait déjà été utilisée par Dumas
dans le troisième volume de La
Maison de Savoie, avec quand même des modifications au
niveau de l'écriture (le style est plus agréable, plus «aéré»
dans Les deux reines).
Ces deux reines, ce sont donc les deux femmes successives de Charles II,
Marie Louise d'Orléans et Anne de Neubourg. Et ce sont deux beaux
portraits qui nous sont ainsi proposés.
Marie Louise d'Orléans (soeur de celle qui sera la femme de Victor
Amédée II, l'amant de la narratrice de ces mémoires)
quitte donc la France avec dans le coeur son amour pour le fils de Louis
XIV. Regrettant jusqu'à sa mort son beau pays de France, elle va
vivre quasiment prisonnière à la cour d'Espagne sous la
férule de sa camarera-mayor et de son confesseur. L'amour grandiose
que lui porte le duc d'Astorga, qui va jusqu'à brûler son
magnifique palais après avoir donné une fête en son
honneur afin que rien de ce qui a été utilisé pour
elle ne le soit pour personne d'autre, n'entame en rien sa volonté
d'être fidèle à son époux, même si petit
à petit, son cur répond à cet amour insensé.
Aimée jusqu'à la folie par son époux, elle n'abusera
pas de son pouvoir sur ce roi laid, chétif, maladif et qui était
incapable de gouverner seul. Victime des machinations autrichiennes pour
amener le roi à faire un testament en faveur de l'Autriche, elle
fera passer jusqu'au bout le bonheur de l'Espagne avant tout. Sur son
lit de mort, bien que se sachant empoisonnée par madame de Soissons,
elle fera jurer à tous de cacher les causes réelles de sa
mort, évitant ainsi au pays de plonger dans une guerre que la France
n'aurait pu manquer de déclarer.
Anne de Neubourg, outre le fait de quitter sa famille pour une cour réputée
pour sa tristesse et son austérité, a en plus la redoutable
mission de prendre la place de la femme que Charles idolâtre encore.
Autant dire que les pleurs et les peurs qui accompagnent son arrivée
en Espagne semblent justifiés...
Mais curieusement, elle va trouver son bonheur dans son dévouement
et dans la consolation de ce roi dont elle est peut-être la seule
à vraiment comprendre la souffrance. Grâce à cela,
elle acquiert un immense pouvoir sur l'esprit du roi, ce qui va aussi
déclencher des manigances de la part de la maison d'Autriche qu'elle
va intelligemment réussir à déjouer avec l'aide du
prince de Darmstadt qui est follement amoureux d'elle.
Ces deux destinés de femme sont bien touchantes et finalement se
ressemblent un peu. Elles auront toutes deux été l'objet
de machinations pour le testament de Charles II, auront toutes les deux
été aimées d'un grand amour qui se transformera en
dévouement devant leur refus d'aller plus loin (l'une par devoir,
l'autre par amour), toutes deux s'étioleront dans ce pays trop
triste et elles auront toutes les deux une fin terrible (l'une par empoisonnement,
l'autre oubliée de tous et dans la misère).
En conclusion, c'est un bien beau roman, émouvant (la scène
de la mort de Marie Louise est poignante) et parfois troublant, avec le
grand rôle joué par le fantôme de Marie Louise et la
scène finale, cauchemardesque, de la folie de Charles.
Nicole Vougny
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