Titre
Le chevalier d'Harmental
Année de publication
1842
Genre
Roman
Collaborateur(s)
Auguste Maquet
Epoque du récit
1718
Résumé
Raoul d'Harmental, jeune aristocrate monté à Paris en 1711,
est un aventurier plutôt susceptible et impétueux. S'étant
illustré à la dernière victoire de Louis XIV, nommé
colonel à cette occasion, d'Harmental se trouve après la
mort du roi mêlé au conflit qui oppose le parti des princes
légitimes et celui des bâtards. Philippe d'Orléans,
prince légitime, est régent de France alors que Louis XV
est encore enfant.
D'Harmental
se voit d'abord retirer son régiment, ce qui ne laisse pas de le
contrarier. Après son régiment, c'est sa maîtresse,
Sophie d'Averne, que le régent lui enlève.
Le chevalier est alors mûr pour conspirer. La duchesse du Maine,
dont le mari, fils légitimé de Louis XIV, a été
privé de ses droits par le régent, lui fait des propositions
en ce sens. D'Harmental doit enlever le duc d'Orléans et l'emmener
en Espagne, projet pour lequel il loue les services du capitaine Roquefinette,
ancien militaire désabusé.
En attendant le moment propice à l'enlèvement, caché
dans une chambre d'étudiant, Raoul d'Harmental désoeuvré
s'intéresse à sa voisine d'en face: une jeune fille charmante
et de bonne éducation, qui joue du clavecin et dessine admirablement.
Devinant chez Bathilde du Rocher une origine noble malgré une vie
modeste, Raoul en tombe rapidement amoureux et parvient à entrer
en contact avec elle. Orpheline, Bathilde fut recueillie et élevée
par Jean Buvat, écrivain-calligraphe à l'esprit simple et
généreux.
Le plan d'enlèvement du régent échoue. Les conspirateurs
tentent alors de renverser le régent par la voie politique, avec
l'appui de Philippe V, roi d'Espagne et petit-fils de Louis XIV, en provoquant
la réunion des Etats-Généraux.
C'est le «bonhomme» Buvat, mêlé au complot en
tant que copiste, qui permet au régent et au ministre Dubois de
déjouer toute la conspiration. Les conspirateurs, affolés,
projettent un ultime enlèvement, nouvel échec où
d'Harmental est capturé puis envoyé à la Bastille.
Bathilde, au désespoir de voir son fiancé condamné
à mort, parvient à se faire introduire chez le régent,
à qui elle rappelle les services rendus par son père Albert
du Rocher. Philippe, surnommé le débonnaire, libère
finalement d'Harmental qui se marie avec Bathilde. Les autres conjurés,
le duc et la duchesse du Maine au premier chef, seront libérés
quelques mois plus tard.
Analyse
Le chevalier d'Harmental occupe une
place particulière dans l'oeuvre de Dumas: premier grand roman
historique, il inaugure le succès romanesque d'un auteur qui est
jusque-là connu pour son théâtre.
C'est aussi la première réelle collaboration avec Auguste
Maquet, après une pièce intitulée Bathilde
(1839), qui fut inspirée à Maquet par les Mémoires
de Jean Buvat. Ce sont ces mêmes personnages que nous retrouvons
dans Le chevalier d'Harmental.
Historiquement, il s'agit de la conspiration dite de Cellamare, du nom
du prince qui en fut l'instrument, où la duchesse du Maine tente
d'enlever le pouvoir au régent Philippe d'Orléans pour le
donner à son mari, fils de Mme de Montespan, reconnu par Louis
XIV.
Ce premier roman historique, du genre «de cape et d'épée»,
entrelace de façon particulièrement habile les destinées
d'une poignée de personnages, et présente déjà
nombre d'ingrédients des futurs grands succès de Dumas.
Un jeune picaro, chevalier naïf et ambitieux, noble de province monté
à Paris pour y trouver fortune; un duel, un bal masqué à
l'Opéra; un vieux matois de capitaine désargenté
et prêt à tout; une conspiration qui n'en finit pas d'échouer;
un cabaret-maison close où se croisent sans se voir les couches
sociales les plus éloignées; une jeune, belle et pauvre
orpheline dont le beau chevalier devine d'instinct l'extraction noble...
Puis l'écrivain Buvat, qui nous rappelle que c'est grâce
à sa «belle écriture» que Dumas, «monté»
à Paris, a pu y rester, comme expéditionnaire chez le duc
d'Orléans:
«Une belle écriture, voilà tout ce que j'avais!
Ce brevet d'incapacité, oh! il était bien à moi!»,
écrit-il dans ses mémoires. On conçoit toute la tendresse
qu'il met dans ce personnage de Buvat.
Jusqu'au capitaine d'Artagnan, pourtant mort en 1673, qui fait ici plus
d'une apparition, clin d'oeil qui nous indique que les mousquetaires,
à paraître trois ans plus tard, sont déjà en
germe.
Le chevalier d'Harmental est un roman
enjoué et délibérément optimiste, à
contre-courant de la mode littéraire de son temps, la mélancolie,
«sentiment tout moderne, né du bouleversement des fortunes
et de l'impuissance des hommes».
Ce roman a donné lieu à une version scénique,
sous le même nom Le
chevalier d'Harmental. Signalons enfin, parmi les adaptations télévisuelles
du roman, celles de Jean-Pierre Decourt (1966) et de Gérard Vergez
(1977).
Jean-Michel Assan
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