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Chapitre CCV


Incompatibilité de la littérature et des émeutes. – « La Maréchale d'Ancre ». – Mon opinion sur cette pièce. – « Farruck le Maure ». – Débuts d'Henry Monnier au Vaudeville. – Je quitte Paris. – Rouen. – Le Havre. – Je médite d'aller explorer Trouville. – Qu'est-ce que Trouville ? – L'Anglaise poitrinaire. – Honfleur. – Par terre ou par mer.

C'était une vie fatigante que celle que nous menions : chaque jour amenait son émotion, soit politique, soit littéraire.
Antony poursuivait le cours de son succès au milieu des émeutes.
Tous les soirs, sans que l'on pût lui assigner de motif quelconque, un rassemblement se formait sur le boulevard. Le lieu du rassemblement variait du théâtre du Gymnase au théâtre de l'Ambigu. D'abord composé de cinq ou six personnes, il s'augmentait progressivement ; les sergents de ville, alors, apparaissaient, se promenaient d'un air provocateur sur le boulevard, les gamins leur jetaient des trognons de chou ou des tronçons de carotte, et cela suffisait pour constituer, au bout d'une demi-heure ou d'une heure, une bonne petite émeute qui commençait à cinq heures du soir, et finissait à minuit.
Cette irritation populaire et quotidienne attirait beaucoup de monde sur le boulevard, et très peu au spectacle. Antony était la seule pièce qui bravât l'émeute et la chaleur par une moyenne de douze à quinze cents francs de recette.
Mais il y avait une telle stagnation dans les affaires, une telle crainte répandue dans le commerce de librairie, que ces mêmes éditeurs qui m'avaient offert six mille francs d'Henri III et douze mille francs de Christine, osaient à peine m'offrir d'imprimer Antony à moitié frais et de compte à demi. Je fis imprimer la pièce, non pas à moitié frais avec un libraire, mais bien à mes frais tout entiers.
Il n'y avait pas moyen pour moi de rester plus longtemps à Paris : les émeutes me mangeaient beaucoup trop de temps et d'argent. Antony ne rapportait pas assez pour entretenir un homme sur le pied de guerre ; et puis j'étais aiguillonné du démon poétique, qui me poussait à faire quelque chose de nouveau.
Mais le moyen de travailler à Paris, au milieu des réunions de la Grande- Chaumière, des dîners aux Vendanges de Bourgogne, et des procès en cour d'assises ?
Je m'abouchai avec Cavaignac et Bastide ; j'appris qu'il n'y aurait rien de sérieux à Paris pendant six mois ou un an, et j'obtins un congé d'un trimestre.
Seulement, deux motifs me retenaient encore à Paris : la première représentation de La Maréchale d'Ancre et les débuts d'Henry Monnier.
De Vigny, qui n'avait encore hasardé au théâtre que sa traduction d'Othello, dont j'ai parlé en son temps, allait y faire sa véritable entrée par La Maréchale d'Ancre.
C'était un beau sujet ; j'avais été sur le point de le traiter. J'y avais renoncé parce que mon bon et savant ami Paul Lacroix, plus connu alors sous le nom de bibliophile Jacob, avait commencé un drame sur le même sujet.
Louis XIII, cet enragé chasseur à la pie-grièche, échappant à la tutelle de sa mère par un crime, proclamant sa majorité au bruit de la pistolade qui tue le favori de Marie de Médicis, décidant cette infâme action tout en jouant aux échecs avec son favori de Luynes plus vieux que lui de deux ans à peine ; ce monarque, timide au Conseil et brave à l'armée, véritable Valois égaré parmi les Bourbons, maigre, douloureuse et maladive figure, placée de profil entre Henri IV et Louis XIV, qui l'étouffent, l'un de sa bonté, l'autre de sa grandeur ; – ce Louis XIII me promettait une curieuse figure royale à modeler, à moi qui avais déjà jeté Henri III à la fonte, et qui devais plus tard y jeter Charles IX.
Mais, comme je l'ai dit, j'y avais renoncé. De Vigny, qui ne connaissait point Paul Lacroix, ou qui le connaissait à peine, n'avait pas le même motif d'abstention, et il avait, sur ce sujet, fait recevoir à l'Odéon un drame en cinq actes en prose. C'était encore une bataille à livrer.
De Vigny, à cette époque, comme aujourd'hui même encore, je crois, appartenait au parti royaliste. Il y avait donc à combattre pour lui deux choses : les ennemis que lui faisait son opinion, et ceux que lui faisait son talent – talent froid, sobre, charmant, plus rêveur qu'actif, plus spirituel qu'ardent, plus nerveux que fort.
La pièce était admirablement montée. Mademoiselle George jouait la maréchale d'Ancre ; Frédérick, Concini ; Ligier, Borgia ; Noblet, Isabelle.
Notre différence d'envisager le drame, entre de Vigny et moi, éclate dans cette seule nomenclature d'acteurs. On y cherche vainement Louis XIII. – J'en eusse fait mon personnage principal.
Au reste, l'absence de Louis XIII dans le drame de De Vigny tient peut-être plus à une opinion politique qu'à une combinaison littéraire. L'auteur, royaliste, comme je l'ai dit, aura mieux aimé laisser la royauté dans la coulisse que de montrer au public sa face pâle et tachée de sang.
La Maréchale d'Ancre est plutôt un roman qu'une pièce de théâtre ; l'intrigue est trop compliquée dans les coins, si l'on peut dire cela, et trop simple dans le milieu. La maréchale tombe – sans lutte, sans péripétie, sans se retenir à rien : elle glisse, et elle est à terre ; du moment où elle est arrêtée, elle est morte.
Quant à Concini, comme l'auteur en était fort embarrassé durant tout cela, il lui a fait passer dix heures chez un juif, à attendre une jeune fille qu'il a vue une fois ; et, au moment où il apprend que Borgia est près de sa femme, au moment où la jalousie devrait lui donner des ailes pour courir au Louvre, il se perd dans un escalier.
Pendant tout le quatrième acte, c'est-à-dire pendant qu'on a conduit sa femme à la Bastille, pendant qu'on l'a jugée, pendant qu'on l'a condamnée, il a tâtonné, cherché la rampe, cherché la porte ; sorti de la chambre d'Isabelle à la fin du troisième acte, il ne reparaît dans la rue qu'au commencement du cinquième, et, cela, pour venir mourir au coin de la rue de la Ferronnerie.
C'est là l'idée principale du drame. Selon l'auteur, Concini est le véritable assassin d'Henri IV ; Ravaillac n'est que le couteau. Voilà pourquoi, au lieu d'être tué sur la borne de la cour du Louvre, le maréchal d'Ancre est tué sur la borne de la rue de la Ferronnerie, à l'endroit même où s'appuya l'assassin pour donner le terrible coup de couteau du vendredi 14 mai 1610.
Au reste, je suis de l'avis de l'auteur ; je ne crois pas qu'il soit bien nécessaire qu'une oeuvre d'art ait toujours, pour autorité, « un parchemin par crime, et un in-folio par passion ». Il y a longtemps que j'ai dit qu'en matière de théâtre, surtout, il me paraissait permis de violer l'histoire, pourvu qu'on lui fit un enfant ; mais faire tuer Henri IV par Concini, sans autre but pour Concini que de régner, après la mort du Béarnais, par la reine et sur la reine, c'est donner une bien petite raison à un si grand crime. Soit, mettez Concini derrière Ravaillac. Mais, derrière Concini, mettez la reine et d'Epernon, et, derrière la reine et Epernon, mettez cette éternelle ennemie de la France, l'Autriche ! l'Autriche, qui n'a jamais touché à la France qu'avec la pointe du couteau de Jacques Clément, du poignard de Ravaillac ou du canif de Damiens, sachant bien qu'il était trop dangereux de la toucher avec la pointe d'une épée.
Le succès fut un peu froid, malgré les beautés de premier ordre que renferme l'ouvrage, beautés de style surtout. Un accident y contribua : après les deux premiers actes, les meilleurs à mon avis, je ne sais quel caprice prit à George ; elle simula une indisposition, et le régisseur, en habit noir et en cravate blanche, vint annoncer aux spectateurs que le reste de la représentation était remis à un autre jour.
En effet, La Maréchale d'Ancre ne fut reprise que huit ou dix jours après. Il fallait une rude constitution pour résister à un pareil échec ! La Maréchale d'Ancre y résista, et poursuivit un cours honorable de représentations.
Entre La Maréchale d'Ancre et les débuts d'Henry Monnier, passa, à la Porte-Saint-Martin, un drame en trois actes, patronné par Hugo et par moi : c'était Farruck le Maure, du pauvre Escousse. La pièce n'était pas bonne, et eut, grâce à Bocage, un succès supérieur à celui que l'on en pouvait attendre. Depuis. elle prit une certaine importance lors du suicide de l'auteur, lequel, à son tour, fut plus connu par la chanson ou plutôt par l'élégie de Béranger qu'il ne l'avait été par les deux pièces qu'il avait fait jouer.
Nous reviendrons sur ce malheureux enfant et sur Lebras, son compagnon de suicide.
Ce fut le 5 juillet que débuta Henry Monnier. Je doute que jamais début ait produit une telle émotion littéraire. Henry Monnier avait alors vingt-six ou vingt-huit ans ; il était connu dans le monde artistique sous une triple face.
Comme peintre, élève de Girodet et de Gros, il avait, à son retour d'un voyage en Angleterre, fait faire les premières gravures sur bois qui aient été exécutées à Paris, et publié les Moeurs administratives, les Grisettes et les Illustrations de Béranger.
Comme auteur, à l'instigation de Latouche, son ami, il avait fait imprimer ses Scènes populaires, grâce auxquelles la renommée du gendarme français et du titi parisien s'est étendue jusqu'au bout du monde.
Enfin, comme comédien de société, il avait fait la joie de nos soupers en nous jouant, derrière une tapisserie ou un paravent, sa Halte d'une diligence, son Etudiant et sa Grisette, sa Femme qui a trop chaud et son Ambassade de M. de Cobentzel.
A force d'être applaudi dans les salons, il avait eu l'idée de se hasarder au théâtre, et il s'était fait à lui-même, et pour ses propres débuts, une pièce intitulée La Famille improvisée, et qu'il avait tirée de ses Scènes populaires.
Deux types créés par Henry Monnier sont restés et resteront : c'est Joseph Prudhomme, professeur d'écriture élève de Brard et Saint-Omer, et Coquerel, amant de la Duthé et de la Briand.
J'ai parlé de la salle du Théâtre-Français le jour de la première représentation d'Henri III ; la salle du Vaudeville n'était pas moins remarquable dans la soirée du 5 juillet : toutes les illustrations littéraires et artistiques semblaient s'être donné rendez-vous rue de Chartres.
En peintres et en sculpteurs, Picot, Gérard, Horace Vernet, Carle Vernet, Delacroix, Boulanger, Pradier, Desboeufs, les Isabey, Thiolier, que sais-je, moi ? En poètes, Chateaubriand, Lamartine, Hugo, nous tous, enfin. En artistes dramatiques mademoiselle Mars, mademoiselle Duchesnois, mademoiselle Leverd Dorval, Perlet, Nourrit, tous les acteurs qui n'étaient pas forcés d'être en scène ce soir-là. En gens du monde, Vaublanc, Mornay, Blancménil, madame de La Bourdonnaie, la spirituelle madame O'Donnell, l'éternelle madame de Pontécoulant, Châteauvillars, qui a le privilège de ne vieillir ni de visage ni d'esprit, madame de Castries, le faubourg Saint- Germain, la Chaussée-d'Antin, et le faubourg Saint-Honoré. En journalistes, la presse tout entière.
Le succès fut immense. Henry Monnier reparut deux fois, rappelé d'abord comme acteur, ensuite comme auteur.
On était, je l'ai dit, au 5 juillet ; à partir de ce jour jusqu'à la fin de décembre, la pièce ne quitta point l'affiche.
Le lendemain, je partis.
Où allais-je ? Je n'en savais rien. J'avais jeté une plume au vent ; le vent, ce jour-là, venait du midi : il avait poussé ma plume vers le nord. J'allai donc vers le nord, au Havre probablement.
Il y a un invincible attrait qui vous ramène, d'ailleurs, vers les lieux qu'on a déjà visités.
On se le rappelle, j'avais déjà été au Havre en 1828, et j'avais refait Christine, comme plan du moins, dans la voiture de Paris à Rouen.
Puis c'est une si belle ville à voir que Rouen avec sa cathédrale, son église Saint-Ouen, ses vieilles maisons de bois sculpté, son hôtel de ville, son hôtel Bourgtheroude, qu'on meurt d'envie de la revoir !
Je m'arrêtai un jour à Rouen.
Le lendemain, le bateau partait à six heures du matin.
A cette époque, on mettait encore quatorze heures à aller de Paris à Rouen en diligence, et dix heures à aller de Rouen au Havre en bateau.
Aujourd'hui, par l'express-train, on met trois heures et demie !
Il est vrai que l'on part, que l'on arrive – quand on arrive – mais que l'on ne voyage pas ; vous ne voyez ni Jumièges, ni la Meilleraie, ni Tancarville, ni toute cette charmante côte de Villequier où, un jour – dix ans après celui où j'y passai – la fille de notre grand poète trouva la mort au milieu d'une partie de plaisir.
Pauvre Léopoldine ! elle serait à Jersey aujourd'hui, complétant la pieuse colonie qui rend, sinon la patrie, du moins la famille à notre Dante exilé, et rêvant un autre Enfer !
Oh ! que ne suis-je le mystérieux inconnu dont le bras élastique s'étendait d'un côté à l'autre du Guadalquivir, pour offrir du feu au cigare de don Juan ! comme j'étendrais, chaque matin et chaque soir, mon bras de Bruxelles à Jersey pour toucher la main amie qui a écrit les plus beaux vers et la plus vigoureuse prose qui aient été écrits dans ce siècle !
On ne voit pas non plus Harfleur avec son ravissant clocher, bâti par les Anglais ; ce qui faisait dire à je ne sais plus quel évêque voyageant pour s'instruire : « Je me doutais bien que cela n'avait pas été fait ici ! »
Mais, enfin, on va au Havre, on revient le même jour, et l'on peut encore être à Aix-la-Chapelle le lendemain matin.
Supprimer la distance, c'est augmenter la durée du temps.
Désormais, on ne vivra pas plus longtemps ; seulement, on vivra plus vite.
Arrivé au Havre, je me mis en quête d'un endroit où passer un mois ou six semaines ; je demandai un village, un coin, un trou, pourvu qu'il fût au bord de la mer : on me nomma Sainte-Adresse et Trouville.
Un instant, je flottai entre les deux pays, qui m'étaient aussi inconnus l'un que l'autre ; mais, ayant poussé plus loin mes informations, et ayant appris que Trouville était encore plus isolé, plus perdu, plus solitaire que Sainte Adresse, j'optai pour Trouville.
Puis je me rappelai, comme on se rappelle un rêve, que mon bon ami Huet, le paysagiste, le peintre des marais et des grèves, m'avait parlé d'un charmant village au bord de la mer où il avait failli s'étrangler avec une arête de sole, et que ce village s'appelait Trouville. Seulement, il avait oublié de me dire comment on allait à Trouville.
Il fallut m'en enquérir. Il y avait au Havre infiniment plus d'occasions pour Rio de Janeiro, pour Sydney ou pour la côte de Coromandel qu'il n'y en avait pour Trouville.
Trouville, comme latitude, était alors à peu près aussi ignoré que l'île de Robinson Cruso.
Des navigateurs, en allant de Honfleur à Cherbourg, avaient signalé de loin Trouville comme une petite colonie de pécheurs qui, sans doute, commerçait avec La Délivrande et Pont-l'Evêque, ses voisins les plus proches ; mais on n'en savait pas davantage. Quant à la langue que parlaient ces pêcheurs, on l'ignorait complètement ; toutes les relations qu'on avait eues jusqu'alors avec eux ; on les avait. eues de loin et par signes.
J'ai toujours eu la rage des découvertes et des explorations ; je résolus, sinon de découvrir, du moins d'explorer Trouville, et de faire, pour la rivière de la Touque, ce que Levaillant, ce voyageur chéri de mon enfance, avait fait pour la rivière des Eléphants.
Cette résolution prise, je sautai dans le bateau qui allait à Honfleur, où de nouveaux renseignements sur la route à suivre devaient m'être donnés.
Nous arrivâmes à Honfleur. Pendant cette traversée de deux heures faite au moment du flux, tout le monde eut le mal de mer, excepté une belle Anglaise poitrinaire, aux longs cheveux flottants, aux joues de pêche et de rose, qui combattait le fléau à grands verres d'eau-de-vie ! Je n'ai jamais rien vu de plus triste que cette belle figure debout et errante sur le pont du bâtiment, tandis que tout le monde était assis ou couché. Elle, dévouée à la mort avec toutes les apparences de la bonne santé, tandis que tous ces passagers, qui semblaient près de mourir devaient, comme tant d'autres Antées, reprendre leurs forces dès qu'ils toucheraient la terre. Si les spectres existent, ils doivent marcher, regarder et sourire comme marchait, regardait et souriait cette belle Anglaise.
En abordant à Honfleur, au moment où le bâtiment s'arrêta, sa mère et un jeune frère blond et rose comme elle semblèrent se lever comme d'un champ de bataille, et la rejoignirent d'un pas traînant. Elle, au contraire, pendant que nous reconnaissions nos malles et nos portemanteaux, franchit légèrement le pont-levis qui venait d'amarrer au rivage le paquebot en miniature, et disparut à l'angle d'une rue de Honfleur.
Je ne l'ai jamais revue, et je ne la reverrai probablement jamais que dans la vallée de Josaphat ; mais, si je la revois, là ou ailleurs – en ce monde, ce qui me parait peu possible, ou dans l'autre, ce qui me paraît peu probable – je réponds que, du premier coup d'oeil, je la reconnaîtrai.
A peine à Honfleur, nous nous occupâmes de savoir par quels moyens nous pourrions nous transporter à Trouville.
Il y avait deux moyens d'y arriver : la voie de terre et la voie de mer.
Par la voie de terre, on nous offrait une mauvaise charrette et deux mauvais chevaux. Cette mauvaise charrette et ces deux mauvais chevaux, moyennant vingt francs, nous voitureraient par un mauvais chemin, et, au bout de cinq heures, nous arriverions à Trouville.
Par la voie de mer, on nous offrait, à la marée descendante, c'est-à-dire dans deux heures, une jolie barque avec quatre vigoureux rameurs ; un voyage pittoresque le long des côtes, où je trouverais force oiseaux, tels que mouettes, goélands, plongeons ; à droite, l'Océan infini ; à gauche, des falaises gigantesques. Puis, si le vent était bon – et il ne pouvait manquer d'être bon, les matelots ne doutent jamais de cela ! – puis, si le vent était bon, deux heures de traversée seulement.
Il est vrai que, si le vent était mauvais, il fallait aller à la rame, et qu'on ne savait pas quand on arriverait.
Enfin, on nous demandait douze francs au lieu de vingt.
Par bonheur, ma compagne de voyage – car j'ai oublié de dire que j'avais une compagne de voyage – était une des personnes les plus économes que j'aie connues ; quoiqu'elle eût été assez malade pendant la traversée du Havre à Honfleur, cette économie de huit francs la toucha, et comme je lui avais galamment laissé le choix entre les deux moyens de transport, elle se décida pour le bateau.
Deux heures après, nous quittions Honfleur avec les premiers mouvements du reflux.

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